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La question de la banalisation de la Charte canadienne des droits et libertés est fréquemment soulevée. Tous reconnaissent d’emblée l’importance du principe général formulé parfois sous la forme d’un avertissement lapidaire : « Il faut éviter de banaliser la Charte. » Dans cet emploi, le verbe banaliser signifie supprimer tout caractère distinctif du texte ou des droits qu’il reconnaît, le dépouiller de tout contenu substantiel. Banalisation des droits. Banalisation générale de la liberté d’expression. « L’appelant a affirmé que recourir à l’article un de la Charte reviendrait à banaliser les droits fondamentaux qu’elle garantit. »
En un sens plus particulier, la banalisation peut être le fait de donner au principe consacré de la liberté d’expression, par exemple, un champ trop général qui dépasse l’expression politique et, peut-être même, l’expression artistique et culturelle.
En outre, le fait d’élargir inconsidérément la portée d’un critère peut conduire à la banalisation d’un principe garanti. « Le critère qui sert à déterminer si une peine est beaucoup trop longue est, à bon droit, strict et exigeant. Un critère moindre tendrait à banaliser la Charte. »
Tout ce qui diminue l’importance, la valeur ou l’intérêt d’une règle édictée, tout ce qui rend insignifiante ou dérisoire une mesure ou une sanction adoptée, atténue l’unicité ou l’originalité d’une disposition ou entraîne son avilissement ou sa dilution mettra inévitablement en mouvement le phénomène de la banalisation : « On ne saurait, sans les banaliser, conclure que les dispositions invoquées s’appliquent au simple quantum de rémunération pour services rendus. ».
Enfin, la banalisation pourra être la conséquence de l’assujettissement de plusieurs infractions à une seule disposition : « Toutes les infractions de nature réglementaire imposent une certaine limite à la liberté au sens large. Mais je crois que ce serait banaliser la Charte que d’assujettir toutes ces infractions à l’article 7 comme des violations du droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne, même si elles peuvent être maintenues en vertu de l’article un. ».
La banalisation est, dans ce cas, l’opération qui a pour but de supprimer, pour une chose, tous les signes extérieurs distinctifs et, pour une personne, de lui faire porter un habillement particulier ou commun, selon le cas, afin de dissimuler sa véritable identité. Ainsi, la banalisation d’une voiture de police est l’opération qui consiste à enlever toutes marques distinctives sur le véhicule, à lui faire perdre tous ses signes extérieurs le signalant comme appartenant à la police. L’utilisation de voitures banalisées (on dit aussi voitures-pièges) et le recours aux agents banalisés ("undercover agents") servent à réprimer certaines infractions au code de la route ou au code criminel. « Ce soir-là, l’agente, membre de l’escouade des mœurs, travaillant comme agente banalisée, jouait le rôle d’une prostituée. Assis dans une auto-patrouille banalisée, stationnée tout près de là, se trouvaient deux autres agents. » « Dans l’arrêt Hébert, il s’agissait d’établir la recevabilité d’éléments de preuve obtenus par un policier banalisé qui s’était fait passer pour un codétenu. »
L’opération peut consister à mettre un bâtiment administratif (les exemples relevés ont trait, bien souvent, à des centres universitaires) sous le régime du droit commun. Ainsi la banalisation d’un campus a-t-elle pour but de restituer aux autorités de droit commun le pouvoir de police.
En droit aérien, plus précisément en matière d’exploitation internationale, la banalisation est une formule de coopération entre compagnies aériennes. Elle est définie comme l’utilisation par une entreprise exploitant un service international en vertu d’un accord ou d’une autorisation officielle d’un aéronef appartenant à une entreprise étrangère et immatriculé dans un État étranger, avec ou sans avantage. « La banalisation est réalisée avec des aéronefs loués sans équipage; c’est le preneur qui le fournit. »
La banalisation peut également exister en droit interne entre compagnies relevant d’un même État et aéronefs relevant d’un même pavillon. Elle résulte d’une convention de location ou d’une convention d’affrètement. « Ayant pris la qualité de transporteur dans les billets de passage ou dans les lettres de transport aérien, la compagnie demanderesse a fait exécuter le contrat par un aéronef banalisé appartenant à la compagnie défenderesse, transporteur de fait au sens de la Convention de Guadalajara. » Banalisation des aéronefs. Aéronefs banalisés. Opérations de banalisation. Accord de banalisation.
Dans le droit des transports, on dit d’une voie de circulation générale empruntée par des véhicules de transport en commun que c’est un site banalisé. On dit aussi site banal. Le terme correspond aux termes "non-reserved lane" ou "public street shared right-of-way". Autobus, tramway en site banalisé. Transport en commun en site banalisé.
En droit administratif, la banalisation des licences est l’affectation des licences de transport ou de location à une entreprise, et non plus à tel ou tel véhicule déterminé. L’entreprise peut utiliser une licence banalisée avec n’importe quel véhicule de son parc de tonnage correspondant.
En droit commercial, la banalisation d’un marché se définit comme l’ensemble des actions commerciales et des phénomènes économiques qui rapprochent le couple marché-produit des conditions de vente d’un produit banal. Les produits banals ("non-durable goods", "commodity products", "current goods" ou "convenience goods") sont des articles d’achat courant et de grande diffusion qui se distinguent des produits animaux. Ce sont des biens de grande consommation, des biens banals, détruits à court terme. On dit aussi d’eux que ce sont des articles d’usage, de menus articles, des articles ou des produits courants. La banalisation des produits fabriqués industriellement comprend la diffusion du savoir-faire de leur fabrication et l’apprentissage de leur utilisation.
En ce sens, on parle, dans le droit de l’environnement, des déchets industriels banals comme résultant d’une activité industrielle, mais assimilables à des déchets de consommation ou à des ordures ménagères.
© Centre de traduction et de terminologie juridiques (CTTJ), Faculté de droit, Université de Moncton