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Juridictionnaire

compléter / remplir 2

  1. On ne peut pas demander à une personne de compléter une chose qui est déjà complète quand on entend dire qu’elle doit la remplir.

    Les verbes compléter et remplir ont un sens distinct. On remplit un formulaire, une formule, un questionnaire ou une demande, s’il s’agit de fournir les renseignements nécessaires, on complète le document, s’il est incomplet, parce qu’il faut y joindre des pièces ou des justificatifs. Telle la situation dans laquelle se trouve l’apatride. « L’étranger qui sollicite le statut d’apatride doit adresser sa demande directement à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides. Une fois le formulaire ad hoc rempli et complété par l’intéressé, l’Office lui délivre un certificat d’enregistrement. »

    Un formulaire peut être rempli par la personne concernée et complété par elle ou par une autorité compétente, laquelle pourra ajouter aux renseignements fournis qui, seuls, rendent le formulaire incomplet des commentaires, une évaluation, ses paraphes, son visa ou son sceau 1 et 2 ou toute autre marque ou signature requise.

  2. Le verbe compléter est monosémique, son sens étant celui de rendre complet ce qui est resté incomplet, ce qui manque. On complète une information restée fragmentaire, un rapport non terminé, on complète le droit dans une matière où on constate l’existence d’un vide juridique, on complète une liste encore non exhaustive.

    On ne peut donc pas compléter un projet, mais on l’accomplit, on l’exécute, on le réalise, et, ce faisant, on le remplit. De même, on ne peut compléter un accord ou un contrat, si on entend signifier qu’on le conclut, comme on conclut une entente ou une convention.

    On complète, on achève ce qui a été entrepris sans avoir été mené à terme. Pour cette raison, les exemples précédents comportent l’emploi fautif du verbe compléter, qui constitue un anglicisme sémantique. Plutôt que de les compléter, on dira qu’on dresse un dossier, un registre, on compile des renseignements, on achève, on termine un travail, on mène à bien une tâche, on accomplit un apprentissage, on achève ou parachève un ouvrage.

  3. Dans le langage du droit, on dit que l’on complète tout ce qui a été entrepris pour le rendre achevé et régulier afin de le parfaire, c’est-à-dire afin, par exemple, de compléter pour la rendre suffisante la somme qui tient lieu d’offre réelle. On emploie la locution sauf à parfaire pour exprimer le fait que l’on complétera une somme, généralement pour satisfaire une demande de dommages-intérêts, par voie de rajustement : sauf à parfaire ou à compléter.

    En cas d’omission de statuer sur un chef de demande, le juge pourra, au moyen du recours à une procédure simplifiée, compléter sa décision.

    Dans le silence de la loi, le tribunal a pour mission de combler le vide juridique en recourant à son pouvoir discrétionnaire pour compléter le droit ou pour produire du droit ou en créer.

    Lorsqu’il constitue une disposition complétive, le codicille a pour fonction de compléter, même par soustraction, le testament auquel il est annexé.

    Pour sa part, l’annexe 1 représente, entre autres, une disposition jointe à un acte pour en compléter les énonciations.

    La clause de sauvegarde qui assortit un contrat d’une disposition de protection permet à cet égard de le compléter.

    On complète un chèque quand on complète les mentions y figurant qui ont été laissées en blanc, à savoir le nom du bénéficiaire, la somme à payer à son ordre et la date du chèque.

  4. Les adjectifs qui, dans une série synonymique, s’ajoutent au premier adjectif qualifiant le substantif ont pour fonction de compléter, en le précisant ou en le renforçant, le sens de ce dernier. Ainsi en est-il du cas du moyen dilatoire et frustratoire, de la demande frivole et dilatoire ou du cas de la requête frivole, abusive et dilatoire, du requérant apte et idoine à agir ou du moyen idoine et adéquat. C’est là, d’ailleurs, la fonction principale du doublet, du triplet et, plus rarement, du quadriplet dans le langage juridique.
  5. Pour le recours aux substantifs complètement et complétude dans le contexte d’emploi du verbe compléter, on veillera à respecter la distinction qu’il convient d’établir entre ces paronymes. En droit judiciaire, le rôle complémentaire des juridictions, outre leur vocation à dire le droit, consiste à combler ou à compléter les lacunes intentionnelles du droit, à atténuer les rigueurs excessives de certaines interdictions légales et à assurer le complètement des règles de droit éparses en certaines matières, à les compléter. Le complètement est l’action de rendre complet ce qui s’avère incomplet, tandis que la complétude s’entend du caractère ou de l’état de ce qui est devenu complet.
  6. Il convient de rappeler qu’on ne complète un document, un acte tel un formulaire, une formule, un questionnaire, un espace, une case, un contrat, un certificat, une attestation, une citation, une contravention, un rapport que si le document est incomplet en lui-même. « Tous les bénéficiaires doivent remplir un formulaire de déclaration annuelle et y joindre les justificatifs nécessaires pour le compléter. »
  7. Remplir est transitif direct et a pour cooccurrents les plus fréquents dans son sens figuré des besoins, des formalités, des conditions, des exigences, des critères, des fonctions, un poste, une vacance, un rôle, un créneau, une lacune, une tâche, des obligations, des devoirs, un contrat, un projet, une évaluation, une déclaration, un programme, un but, un objectif, un objet, une fin, une finalité, une promesse, un engagement.

    Toutefois, s’il est vrai qu’on remplit des obligations, des devoirs et des engagements, qui sont des formes de responsabilités, on ne peut remplir ni une responsabilité, ni un fardeau de preuve, ni une charge : on l’assume, on s’en acquitte.