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Ces néologismes sont des dérivations savantes du préfixe négatif dé- et des bases adjectivales coupable, criminel, judiciaire, législatif et pénal.
Pendant longtemps, la notion de déjudiciarisation est demeurée floue, sans perdre toutefois son intérêt pratique dans l’administration de la justice pénale. La Commission de réforme du droit du Canada a consacré à la question un de ses documents de travail. Pour elle, l’appellation déjudiciarisation désigne les incidents réglés à l’intérieur de la collectivité, les affaires non transmises à la justice par la police, les conciliations intervenues avant le procès ou l’application de peines autres que l’emprisonnement, tel le service communautaire. En bref, la déjudiciarisation désigne la suspension, dans le cours normal des choses, des mécanismes de la justice pénale à toute étape de la prise des décisions.
Aujourd’hui, les théoriciens de la déjudiciarisation s’entendent pour donner à la notion une acception très précise : elle comprend tout un train de mesures et de programmes antérieurs au procès, appliqués, en remplacement de la procédure judiciaire officielle, aux personnes qui ont des démêlés avec la justice.
Né dans le courant des années 1960 aux États-Unis, le mouvement pour la déjudiciarisation ("diversion") a enrichi la terminologie et la phraséologie du système de justice pénale. On dit d’un cas qu’il est déjudiciarisé s’il n’est pas soumis aux autorités judiciaires (« L’objectif est de fournir les services nécessaires aux accusés dont le cas est déjudiciarisé »), on parle d’une intervention de déjudiciarisation que fait le déjudiciarisant auprès du déjudiciarisé, de programmes de déjudiciarisation avant poursuite ou avant procès, de déjudiciarisation inconditionnelle, nouvelle, traditionnelle, véritable ou volontaire.
Déjudiciarisation de la relation parents-enfants au Nouveau-Brunswick. « La déjudiciarisation de certaines infractions relativement mineures, comme le vol à l’étalage, permettrait de réduire les retards judiciaires. » « Les criminologues ont proposé de déjudiciariser bien des comportements déviants pour les soumettre à des contrôles sociaux ou administratifs et les soustraire à la sanction pénale. »
On appelle juridictionnalisation l’action de rapprocher le droit coutumier, progressivement dans la plupart des cas, du droit moderne. « Il est possible d’opérer au Bénin une juridictionnalisation de la tontine, qui se pratique régulièrement dans toutes nos villes et campagnes avec des résultats assez concluants. » L’antonyme, rare, est déjuridictionnalisation.
Attention : il ne faut pas confondre déjudiciarisation (qui relève du judiciaire) et déjuridicisation (qui relève du juridique). « Les chartes accomplissent la juridicisation du droit à la vie, celle des libertés fondamentales et de la non-discrimination, ce qui soulève la question du rapport entre l’éthique et le droit. » Juridiciser, c’est amener à la vie juridique, tandis que déjuridiciser, c’est soustraire à la sanction du droit. Aussi la juridication aura-t-elle pour effet, parfois, d’étendre le contrôle d’une juridiction en élargissant le champ de sa compétence.
Les émissions sans provision sont dites dépénalisées, c’est-à-dire qu’elles ne sont plus constitutives d’infraction que lorsqu’elles sont perpétrées dans l’intention de nuire. On serait tenté de considérer la pénalisation comme l’antonyme de la dépénalisation, mais c’est l’incrimination qui est son contraire.
© Centre de traduction et de terminologie juridiques (CTTJ), Faculté de droit, Université de Moncton