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Le mot euthanasie est du genre féminin.
Sous un premier aspect, l’euthanasie prend tout son sens étymologique, le mot venant du grec euthanatos, qui signifie belle mort, mort douce. L’euthanasie est, en ce sens, une mort douce entourée de soins palliatifs. Ce serait ainsi la bonne mort, celle qui, dans les circonstances désolantes où se trouve la personne souffrante, s’impose comme paraissant la plus digne et la moins cruelle.
Sous un deuxième aspect, l’euthanasie – acte utilitariste – pose un problème moral : si la vie telle qu’elle est devenue n’offre plus d’occasions de bonheur et d’épanouissement, mais devient une suite ininterrompue de douleurs, souvent atroces, il y a tout lieu, dicte le bon sens, de la supprimer.
Sous un troisième aspect, l’euthanasie motivée par l’eugénisme pose un problème de bioéthique. Pour améliorer la race humaine, il devient parfois impératif d’éliminer les individus inaptes, devenus superflus par leurs déficiences et leur bagage héréditaire. Ils risquent, dans leur progéniture, d’entraver le processus de purification de l’espèce humaine en suscitant l’apparition de certains caractères néfastes ou en répandant des maladies héréditaires. Cette élimination viserait à favoriser la reproduction des plus aptes.
Sous un quatrième aspect, l’euthanasie est compassionnelle et complémente le premier aspect. Pour éviter toute souffrance devenue inutile par l’approche inévitable d’une mort physiquement affreuse et cruelle, ce ne serait que faire preuve d’humanité que de délivrer d’un cercle infernal le malade qui se trouve irrémédiablement en phase terminale. Envisager, pratiquer, réaliser une euthanasie. Procéder à une euthanasie. Provoquer la mort par euthanasie. « L’euthanasie, mieux connue de beaucoup sous le vocable de meurtre par compassion, est l’une des questions les plus litigieuses jamais débattues en politique moderne. »
La décision d’euthanasie serait illégitime d’autant plus qu’il est parfois impossible d’obtenir le consentement du malade en phase terminale. Son consentement à l’euthanasie assistée doit être réfléchi et éclairé, libre et exprès.
Dans un arrêt de principe, la Cour suprême des États-Unis a jugé que l’euthanasie était inconstitutionnelle, même si le législateur dans certains États progressistes a constitutionnalisé la pratique de l’euthanasie, notamment dans les lois de l’État de l’Oregon (1994) et de l’État de la Californie (1976). Ces lois permettent aux malades de faire connaître leur volonté d’opposition à toute intervention thérapeutique.
Dans certaines législations, notamment celle de la Belgique et celle des Pays-Bas, la pratique de l’euthanasie est tolérée, même si la loi elle-même assimile l’euthanasie à un crime et déclare qu’elle est contraire au Code médical. L’acte euthanasique est ainsi passible d’une peine d’emprisonnement maximale de douze ans.
La tentative d’euthanasie est généralement passible de sanction pénale. La personne qui provoque l’euthanasie, qui euthanasie un malade en abrégeant son agonie ou en lui épargnant des souffrances extrêmes peut être condamnée à payer des dommages-intérêts et, si elle est membre d’une profession de la santé, encourir des sanctions disciplinaires exemplaires.
En France, l’euthanasie pour autrui est constitutive d’infractions pénales et toute personne ayant participé ou contribué à sa réalisation peut être poursuivie comme coauteur ou complice. Auteur d’un geste euthanasique, d’un geste d’euthanasie.
Pour être déclaré coupable ou être convaincu d’euthanasie, il faut que soient réunis un élément matériel ou l’actus reus (l’utilisation, l’administration de substances de nature à anticiper ou à entraîner la mort, le fait de donner la mort) et un élément mental ou moral la mens rea (l’intention de tuer, de procurer la mort). Pour les tribunaux, le mobile est toujours indifférent.
La loi française du 4 mars 2002 ne légalise pas l’euthanasie. Par décision du 29 avril 2002, la Cour européenne des droits de l’Homme a refusé d’accorder le droit au suicide assisté d’une patiente en fin de vie. L’euthanasie active ne constitue pas un droit consacré par la Convention européenne des droits de l’Homme.
Au Canada comme en Grande-Bretagne, le débat sur le droit à l’euthanasie oppose deux positions inconciliables fondées sur des conceptions légitimes mais contradictoires, à savoir le respect de toute vie humaine et la volonté de mourir dans la dignité. Les partisans de la première position « dénoncent les dérives auxquelles ne manquerait pas d’ouvrir la reconnaissance d’un droit à l’euthanasie (…) autoriser l’euthanasie provoquerait une brèche morale et sociale considérable dont les conséquences sont difficiles à mesurer. » Les tenants de la deuxième position estiment que « la mort étant inéluctable, la plupart des humains veulent, dans nos sociétés occidentales, être rassurés sur les conditions de leur fin de vie (…) et refusent dans une très grande majorité la déchéance physique et intellectuelle. » (Comité spécial du Sénat canadien sur l’euthanasie, 2000.) Revendication d’un droit à l’euthanasie. Tenant, partisan, défenseur, détracteur de l’euthanasie. Affaire d’euthanasie. Euthanasie liée au sida, à la mort clinique, à la sclérose en plaques, à une maladie terminale ou dégénérative. Décès par euthanasie.
Le Code criminel du Canada interdit expressément la pratique de l’euthanasie et celle du suicide assisté. Selon l’article 14, « nul n’a le droit de consentir à ce que la mort lui soit infligée » et l’article 241 punit d’une peine maximale de quatorze ans d’emprisonnement quiconque est déclaré coupable d’avoir conseillé le suicide ou aidé quelqu’un à se donner la mort. Par ailleurs, cette loi dispose que l’homicide est passible d’une peine maximale d’emprisonnement à perpétuité. Le fait que la victime voulait mourir ne peut être invoqué comme preuve à décharge.
L’euthanasie est assimilée au meurtre et est illégale au Canada et en Grande-Bretagne. Il convient d’établir la distinction nécessaire entre l’euthanasie, le suicide assisté et les autres pratiques de fin de vie (refus de traitement, arrêt de traitement et double effet : médicaments qui soulagent les douleurs, mais qui risquent d’abréger la vie du malade) considérées comme légales. Si, au Canada, l’euthanasie active constitue un acte illégal, l’euthanasie passive est autorisée sur demande du malade. Choisir, demander l’euthanasie. Euthanasie volontaire, euthanasie involontaire.
Bien que le mot d’euthanasie et l’acte euthanasique soient source de maints débats, on s’entend généralement pour dire qu’on ne peut parler d’euthanasie en cas de vie artificielle ou d’état végétatif, tel le cas d’une personne en état de mort clinique ou de mort cérébrale que l’on maintient en vie en la branchant à un appareil. Pour qu’il y ait euthanasie, deux conditions doivent être remplies : la mort doit être provoquée et le sujet euthanasique doit être une personne vivante. Euthanasie hospitalière, euthanasie clandestine.
© Centre de traduction et de terminologie juridiques (CTTJ), Faculté de droit, Université de Moncton