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Juridictionnaire
extra petita / infra petita / omnia petita / ultra petita
- Les latinismes extra petita, infra petita, omnia petita et ultra petita ayant été francisés, ils ne sont pas italicisés dans un texte en caractère romain, et vice-versa.
La graphie sans le trait d’union est plus courante dans l’usage moderne que la graphie traditionnelle avec le trait d’union.
Par leur nature grammaticale, ces expressions sont des locutions substantives, des locutions adjectivales ou des locutions adverbiales. Elles appartiennent au vocabulaire de la procédure civile ou pénale et s’emploient dans le discours juridictionnel. Elles se disent de la décision de justice, que ce soit en matière de justice judiciaire, de justice administrative ou de justice arbitrale, tant en droit interne qu’en droit international privé ou public.
- Selon la règle dite de l’ultra petita (et non la [règle ultra petita]), sous réserve des exceptions légales, toute juridiction ne peut, au risque d’outrepasser les limites de sa compétence et de rendre sa décision ultra vires, excéder le domaine de sa saisine en adjugeant plus que le montant réclamé, en accordant un remède qui ne lui est pas demandé ou en se prononçant sur des questions hors litige ou étrangères aux prétentions qui lui sont soumises. Si elle devait agir de la sorte, elle commettrait un ultra petita. « L’ultra petita, commis par une juridiction répressive, constitue un excès de pouvoir donnant ouverture à cassation. » La Cour suprême du Canada, par exemple, dérogerait à cette règle et commettrait un ultra petita si, appelée seulement à déterminer le sens d’un article de loi, elle s’égarait et statuait sur la constitutionnalité de cette loi.
La règle tire son origine de la disposition des codes de procédure qui prévoit que le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat. Elle s’inspire du principe de l’ultra petita selon lequel l’ordre public commande que le débat judiciaire se limite à ce qui est demandé. Si le juge déroge à la règle, compte tenu des exceptions légales, on dit qu’il statue ultra petita, que, en accordant plus que ce que le requérant demande, il fait de l’ultra petita. « Sur le moyen unique soulevé d’office et tiré du fait que les juges ont statué ultra petita (…) Attendu que la Cour d’appel a statué sur les dispositions pénales, alors qu’elle n’en était pas saisie (…) ». « Le juge d’appel ne peut statuer ultra petita en aggravant la condamnation prononcée par la première juge. » « En condamnant l’Administration à payer des dommages-intérêts supérieurs à ceux qui sont réclamés, la juridiction saisie a fait de l’ultra petita. » Affirmation ultra petita. « La question est de savoir si cet énoncé constitue une affirmation ultra petita. » Vice d’ultra petita (en parlant d’une décision viciée par le dérogation à la règle d’ultra petita).
Si on formule la règle par la négative, on l’appelle règle non ultra petita. « Il était devenu prévisible que la Cour, en vertu de la règle non ultra petita, ne statuerait pas formellement sur ce point de vue dès lors que, dans ses conclusions finales, l’État demandeur n’avait pas repris l’énoncé du moyen qu’il avait initialement avancé dans sa requête introductive d’instance. »
- Dans la perspective du recours en révision ou de l’appel, l’ultra petita devient un moyen qu’invoque la partie requérante pour faire réformer, rectifier ou annuler partiellement la décision rendue au regard de ce qui est accordé de surcroît ou en surplus. Moyen de l’ultra petita (et non [moyen ultra petita]). « Les défendeurs invoquent le moyen de l’ultra petita du fait que le tribunal d’arbitrage a calculé les dommages au titre de la perte d’occasion d’affaires en appliquant une méthode que ni l’une ni l’autre partie ne lui a proposée. »
- Plutôt que de considérer les termes ultra petita et extra petita comme des synonymes ou ce dernier comme constituant une variante du premier, il paraît plus juste d’en faire des quasi-synonymes, la nuance sémantique qui les distingue étant fondée sur leur degré de conceptualisation. Ainsi, il serait plus exact de parler de l’ultra petita quand la cour adjuge un montant supérieur à celui qui est demandé – ultra signifiant littéralement au delà de – et de l’extra petita quand elle juge des questions étrangères à la demande – extra signifiant littéralement en dehors de ou exorbitant.
- On dit de la juridiction qui, exerçant scrupuleusement son office sous les conditions de sa compétence, examine chacune des prétentions des parties, discute et tranche tous les chefs de la demande, qu’elle statue omnia petita.
- L’antonyme commun d’ultra petita et d’extra petita est infra petita, infra signifiant littéralement en deçà de. Commet un infra petita par omission de statuer la juridiction qui manque à son obligation de se prononcer sur une prétention ou sur des chefs de la demande ou qui tranche la demande principale en négligeant de décider une des demandes subsidiaires. « Infra petita ou en dessous de l’objet de la demande, le juge administratif a l’obligation d’examiner les demandes des parties et de statuer, au besoin par rejet, sur toutes ces demandes. » « L’appelant reproche à la Cour d’avoir statué infra petita en omettant de répondre à l’un des griefs. »
Décision entachée, viciée d’infra petita. « La décision des premiers juges est entachée d’infra petita en ce qu’elle statue uniquement sur l’exception de prescription quadriennale opposée par l’État sans se prononcer sur la responsabilité de celui-ci. »
Il importe de préciser que la juridiction qui accorde moins que le montant réclamé ne commet pas d’infra petita. En outre, même si elle est tenue de statuer sur tous les chefs de la demande, elle n’a pas toutefois à répondre à chacun des arguments qu’avancent les parties.
© Centre de traduction et de terminologie juridiques (CTTJ), Faculté de droit, Université de Moncton