- Une circonstance se définit comme un fait de détail, un événement ou une condition qui accompagne un fait principal ou qui concourt à son accomplissement ou à sa réalisation. Circonstances accompagnant un fait donné. En droit, on considère qu’il y a un acte, une opération, une situation et ses circonstances. À moins que le contraire ne résulte de l’acte ou des circonstances. Faire état des faits et des circonstances. Circonstances dans lesquelles a lieu la restitution. Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. Les circonstances d’une affaire, les circonstances de l’espèce, les circonstances en cause s’entendent des incidents et des particularités qui caractérisent l’instance et dont le tribunal doit tenir compte tant dans son exposé des faits que dans son analyse, dans son appréciation des prétentions et des moyens des plaideurs, dans ses motifs et dans sa décision. « À défaut de déclaration expresse, la preuve de l’intention dépendra des circonstances. » Signes, indices ou autres circonstances donnant lieu à soupçon. « Le juge appréciera toutes les circonstances du cas : la proximité du degré, le lieu de la résidence, l’âge et les aptitudes des intéressés. » « Le procès-verbal énonce la date, l’heure, le lieu et les circonstances de la découverte. » « Tous les enfants dont la filiation est établie ont les mêmes droits et les mêmes obligations, quelles que soient les circonstances de leur naissance. »
Appréciation des circonstances. « La loi laisse aux juges du fond l’appréciation des circonstances qui établissent la connexité. » « Le juge est souverain appréciateur des circonstances dont il fait dériver ses convictions. »
Circonstances d’une acquisition, d’un achat. Fiducie réversive découlant des circonstances d’achat ("purchase money resulting trust" en common law).
- Il ne faut pas employer de façon interchangeable, les considérant synonymes, l’expression toutes les circonstances de l’affaire et la locution en tout état de cause, laquelle signifie à toute étape de l’instance et non compte tenu de tous les éléments pertinents se rapportant au litige. « La Commission est convaincue que, eu égard à toutes les circonstances de l’affaire (en tout état de cause), la tenue d’une enquête est justifée. »
- Dans la formule figée compte tenu des adaptations de circonstance, équivalent français de l’expression latine mutatis mutandis, le mot circonstance entre dans la composition de la locution de circonstance et ne se met jamais au pluriel puisqu’il signifie non pas les adaptations que commandent [les circonstances] ("with such modifications as the circumstances require"), mais les adaptations qui conviennent, celles que commande l’espèce ou celles qui sont utiles en l’espèce. Toutefois, une modification peut être adaptée aux circonstances ("modified according to circumstances"). Comparutions de circonstance et non [occasionnelles] : "occasional appearances". Par exemple, un avocat de l’extérieur du ressort demande au Barreau de la province d’être admis à comparaître lors d’instances déterminées. Autres exemples : une loi de circonstance est une mesure exceptionnelle qui vient justifier une situation particulière. Les infractions de circonstance sont commises par suite d’un fait fortuit qui joue le rôle d’incitateur : fait découlant d’une circonstance passagère.
- [Dans toutes les circonstances] est une expression calquée de l’anglais "in all the circumstances". On ne peut pas dire : « Nous avons conclu qu’il serait préférable [dans toutes les circonstances] (= somme toute, tout bien considéré) qu’il interjette appel de sa condamnation. »
- Il faut éviter le pléonasme que crée l’expression rencontre [fortuite] de circonstances puisque la rencontre de circonstances implique que deux ou plusieurs événements plus ou moins simultanés se trouvent fortuitement en présence pour former une conjoncture. Rencontre heureuse, malencontreuse de circonstances.
- Le mot circonstance (et il en est de même pour le mot disposition au sens de mesure législative, réglementaire ou conventionnelle) s’emploie au pluriel, même si un seul fait est en cause : « Le juge Pigeon a formulé cette position en réponse à une plainte portée dans les circonstances suivantes : le demandeur avait présenté une preuve par affidavit fondée sur des principes scientifiques. »
- [En] les circonstances ("in the circumstances") n’est pas français. « Il y a lieu de réserver à la demanderesse tout autre droit ou recours auxquels elle aura droit [en] les circonstances» (= dans les circonstances). « [En] ces circonstances, l’article 18.2 de la Loi sur la Cour fédérale ne peut trouver application. » (= Dans ces circonstances). Pour accompagner le mot circonstances, la préposition en doit être suivie d’un adjectif : en toutes circonstances, en semblables circonstances, en quelles circonstances, en d’autres circonstances, en pareilles circonstances, en certaines circonstances. « En pareilles circonstances, l’employé lésé doit déposer une plainte auprès de la Commission. » « Le fret est dû à la fin du voyage. Il n’est toutefois pas dû en toutes circonstances. »
- Il faut éviter la redondance que comporte le tour les circonstances [entourant] ("circumstances surrounding"), car il y a répétition de l’idée de ce qui est autour. Le mot circonstance est formé du latin circum, qui signifie autour, et de stare, qui signifie se tenir. On ne dit pas : « Le juge a constaté lors de l’interrogatoire du débiteur judiciaire que des circonstances frauduleuses [entourent] la naissance de la dette »; on dirait ici ont donné lieu, ont donné naissance à la dette. De même, à l’article 709 du Code civil du Québec : « Le testament fait par un majeur après sa mise en tutelle peut être confirmé par le tribunal si la nature de ses dispositions et les circonstances [qui entourent] sa confection (= de sa confection) le permettent. », et aux articles 2471 : « …les circonstances [entourant] le sinistre » (= du sinistre), 2870 : «…les circonstances [entourant] la déclaration » (= de la déclaration) et 3112 : « … compte tenu de la nature de l’acte et des circonstances [qui l’entourent] (= et de ses circonstances). Autres exemples : « La police a rendu publique une déclaration laconique sur les circonstances générales [entourant] le décès » (= les circonstances du décès). Circonstances [ayant entouré] la tenue du procès : les circonstances dans lesquelles s’est tenu le procès. Circonstances particulières [entourant] l’infraction : les circonstances de l’infraction, les circonstances se rapportant à l’infraction ou encore les circonstances liées à l’infraction. Circonstances se rattachant à un fait : « Le sens du verbe séjourner est fondé sur la présence physique du demandeur sur le territoire canadien et sur les circonstances se rattachant à cette présence. »
Dans le droit de la preuve ou en droit judiciaire, on parle, en common law, de la preuve explicative des circonstances concomitantes ("evidence of surrounding circumstances"), qui est l’une des sortes de preuves explicatives; par exemple, la preuve est rapportée de la situation familiale d’un testateur afin d’expliquer les dispositions de son testament.
- Contrairement à l’anglais, le français conçoit mal que l’on parle des [circonstances] d’une personne; on dit plutôt sa situation. Ainsi, le tribunal doit tenir compte des besoins et des circonstances qui peuvent expliquer le comportement du jeune contrevenant (et non de ses [circonstances]. « Le tribunal doit prendre en compte les [circonstances] des père et mère » (= la situation). Mais, on l’a vu précédemment, il est correct de parler des circonstances d’une affaire. « L’article de loi enjoint au tribunal d’avoir égard aux circonstances pour parvenir à sa décision. » S’agissant de l’affaire en cause, on dit les circonstances de l’espèce. Il faut considérer non pas les [circonstances] personnelles de l’accusé, mais sa situation personnelle. « Afin que la ’peine corresponde au crime’, le principe de proportionnalité commande l’examen de la situation particulière du délinquant et des circonstances particulières de l’infraction. » ("circumstances of both the offender and the offence").
- S’accommoder aux circonstances, c’est s’adapter à elles, s’y plier, s’y soumettre. Être à la hauteur des circonstances, c’est s’acquitter de la tâche à accomplir, être en mesure de relever le défi.
- Une circonstance peut être soit disculpatoire (et non [exculpatoire] : "exculpatory"), soit incriminante ou inculpatoire : "inculpatory". Elle peut prendre la forme d’un événement ou d’une intervention irrésistible. Par exemple, l’acte de Dieu ("act of God"), aussi appelé acte divin, le cas fortuit et la force majeure constituent des circonstances indépendantes de la volonté humaine ou extérieures à celle-ci (et non [hors de son contrôle]) qui sont imprévisibles et irrésistibles. Circonstance fortuite, circonstance imprévisible. Circonstance de force majeure. « La production de cette pièce décisive a été empêchée par une circonstance de force majeure. »
On dénomme circonstances indépendantes de la volonté (ou des volontés) des parties celles sur lesquelles ces dernières n’exercent aucune maîtrise. On dit aussi circonstances extérieures aux volontés des parties. « Par suite de circonstances extérieures aux volontés des parties, l’accord sur le prix n’a pas pu intervenir. »
L’expression circonstances extérieures peut signifier simplement une situation non prévue dans une entente ou encore une situation qui ne concerne pas les termes mêmes du contrat, comme, par analogie, la définition que donnent de la faute les auteurs : « erreur de conduite que n’aurait pas commise une personne avisée placée dans les mêmes circonstances extérieures que l’auteur du dommage. » « Lorsque le juge réduit les pénalités contractuelles, doit-il tenir compte des seuls éléments du contrat ou également de circonstances extérieures comme la situation du débiteur? »
- Des circonstances peuvent s’avérer impératives, extraordinaires, rares, spéciales, graves et exceptionnelles. Par exemple, l’article 16 de la Constitution française donne au Président de la République des pouvoirs exceptionnels. « Seule l’existence de circonstances exceptionnelles autorise le recours à l’article 16. » Une jurisprudence administrative dite des « circonstances exceptionnelles » (temps de guerre, insurrection appréhendée, états d’urgence) et reflet de la théorie de la nécessité (encore appelée doctrine de la nécessité, selon la matière envisagée) s’est développée, qui établit que, dans ces périodes de trouble, sont réputés réguliers des actes qui, en temps normal, seraient illégaux, ou vice versa. Prendre les mesures que commandent les circonstances exceptionnelles.
Des circonstances peuvent aussi être qualifiées de nouvelles (relèvement d’une déchéance pour circonstances nouvelles), d’incidentes (celles dans lesquelles un acte a été accompli), de concomitantes (celles qui surviennent en même temps que d’autres), d’inhérentes à une personne (celles qui n’ont d’effet que sur la responsabilité de celle-ci) et d’objectives (celles qui excluent la responsabilité).
Autres qualifications : circonstances accidentelles, actuelles, additionnelles, analogues, appropriées, bénignes, décisives, déterminées, difficiles, discordantes, économiques, extérieures, extraordinaires, extrêmes, factuelles, fortuites, historiques, impérieuses, imprévisibles, imprévues, inconnues, limitées, particulières, passagères, pertinentes, plausibles, précaires, présentes, pressantes, propices, restreintes, suffisantes, systémiques.
- En matière de responsabilité pénale, les faits qui obligent le juge à prononcer une peine plus sévère contre l’accusé sont dénommés circonstances aggravantes (remarquer le doublement du g), les circonstances atténuantes (et non [exténuantes] : "extenuating circumstances") pouvant, au contraire, lui permettre de faire preuve de clémence. « Le ministre estime que des circonstances atténuantes justifient une exception à la règle. » « À l’issue des débats, des questions sur la culpabilité de l’accusé et les circonstances aggravantes sont posées au jury. » Les circonstances atténuantes jouent en faveur de l’accusé, elles lui sont favorables, tandis que les circonstances aggravantes pèsent contre lui. Bénéficier des circonstances atténuantes. Accorder le bénéfice des circonstances atténuantes. Souffrir des circonstances aggravantes. Accorder, octroyer les circonstances atténuantes au délinquant, au contrevenant, à l’accusé.
Dans les procès criminels, la peine doit être adaptée aux circonstances aggravantes ou atténuantes liées à la perpétration de l’infraction. Sont notamment considérés comme circonstances aggravantes des éléments de preuve établissant l’harmonisation des peines. Le juge qui détermine la peine doit apprécier les circonstances particulières de l’affaire dont il est saisi, à savoir les facteurs aggravants ou atténuants, la nature de l’infraction, la situation de la collectivité au regard de ce genre d’infraction et la possibilité de fixer des conditions permettant de bien refléter la condamnation sociale de l’infraction.
Le rôle des avocats en présence sera de faire ressortir les circonstances aggravantes ou atténuantes, selon le cas. Généralement, le poursuivant, soit le ministère public (appelé la Couronne dans les provinces canadiennes), énumérera, en tant que circonstances aggravantes ou facteurs d’aggravation, la préméditation, la gravité et la nature de l’infraction, l’abus de confiance, s’il en est, le caractère répétitif du crime, l’incidence de ce genre de crime dans la région, le casier judiciaire ou les antécédents judiciaires du contrevenant, les effets du crime sur la victime et sur la collectivité, la vulnérabilité de la victime, le besoin de dénonciation et de dissuasion, les sommes d’argent en cause, s’il en est, le fait que l’accusé a refusé de reconnaître sa culpabilité, la nécessité de respecter les principes de la proportionnalité, la jurisprudence pertinente et la situation particulière de l’accusé, notamment sa conduite depuis la commission du crime, son âge, sa personnalité et le contenu du rapport présentenciel. De son côté, la défense mettra en évidence, au nombre des circonstances atténuantes, la situation de famille de l’accusé, le rôle positif qu’il joue dans son milieu de travail, sa participation active à la vie communautaire et sa bonne réputation, l’absence d’antécédents judiciaires, son remords et sa situation financière difficile ainsi que la bienveillance du tribunal à l’égard de l’accusé.
- En droit international, des contrats, des conventions ou des traités peuvent être révisés pour cause d’imprévision ou de changement fondamental de circonstances. Les États peuvent invoquer la règle du changement fondamental de circonstances ("rebus sic standibus") en se fondant sur l’article 62 de la Convention de Vienne sur le droit des traités. « Le changement fondamental de circonstances, au sens de l’article 62, n’est pas invocable pour les traités établissant une frontière. » Ce changement fondamental de circonstances constitue un motif extérieur au traité justifiant le retrait de l’adhésion au traité ou l’extinction de celui-ci. Lorsque ce principe peut être invoqué, il doit s’agir d’un changement essentiel, qui porte sur une base fondamentale du consentement à être lié et qui modifie radicalement la nature des obligations qui restent à exécuter en vertu du traité.
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