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Ainsi, notamment : LL. B. (baccalauréat en droit), LL. L. (licence en droit), LL. M. (maîtrise en droit), LL.D. (doctorat en droit), D. C.L. (doctorat en droit civil).
L’usage diffère lorsque les diplômes constituent des titres qui n’ont aucun lien avec une origine latine. B. C.L. (baccalauréat en common law), M. C.L. (maîtrise en common law), M. D.A. (maîtrise en droit des affaires.) « Le CICLEF propose un programme d’études conduisant au diplôme d’études en common law, le Dip. E.C.L. » « La Faculté offre un programme combiné de baccalauréat en droit-maîtrise en administration publique, le LL. B-M. A.P. » « Le diplôme que décerne la Faculté de droit de l’Université de Moncton porte depuis 2012 le nom de J.D. (Juris Doctor); il remplace l’ancienne désignation L.L. B. Bachelor of Law ou baccalauréat en droit). Ce changement s’explique par le fait que le diplôme canadien en common law est un deuxième diplôme universitaire, contrairement au L.L. B. du Royaume-Uni et de plusieurs autres pays du Commonwealth. »
Ainsi, pour le droit des délits, des contrats ou des successions, par exemple, on pourra dire soit en droit délictuel, contractuel ou successoral, soit dans le droit des délits, des contrats ou des successions.
Si l’adjectif qualifiant le mot droit est suivi d’un déterminant, on emploie la locution prépositive d’après ou les prépositions suivant ou selon : d’après, selon, suivant le droit interne du Canada, ou toute autre tournure équivalente.
Pour le doyen Carbonnier, le grand droit (soit le droit objectif avec la majuscule) serait frappé de paralysie, si le petit droit (soit le droit subjectif avec la minuscule) n’existait pas. Le rapport qu’ils entretiennent est vital. Dans une formule heureuse et claire, il explique la distinction qu’il convient de faire entre le droit objectif et le droit subjectif. « Si le droit (objectif) nous permet de faire quelque chose, nous avons le droit (subjectif) de le faire. » Il importe de remarquer que, même s’il indique que le droit objectif prend, dans un certain usage propre aux juristes, la majuscule à l’initiale du mot droit, par contraste avec la minuscule mise au mot droit en parlant du droit subjectif, lui-même ne la met pas systématiquement, à l’instar des autres juristes tenants de cette règle d’écriture.
En somme, l’emploi de la majuscule à l’initiale du mot droit en parlant du droit objectif exclusivement tend à ne plus se justifier dans l’usage moderne que si on entend personnifier ce substantif abstrait ou que le mot relève du genre littéraire de l’allégorie et du symbole (Dieu est mon Droit), comme l’atteste cet usage, entre autres dans la peinture et la littérature : images du Droit, de la Justice, de la Morale.
À la lecture des textes juridiques, on constate rapidement que des termes comme droit subjectif, droit objectif, droit réel, droit personnel, droit substantiel, droit procédural, droit processuel, droit de fond, droit de bail, et ainsi de suite, sont posés sans discussion, comme si leurs sens, en dépit des systèmes de droit, et leurs distinctions fondamentales étaient connus au préalable ou allaient de soi.
Or, ces distinctions méritent réflexion. On ne peut employer adéquatement des termes techniques quand leurs acceptions demeurent floues à l’esprit et quand, se trouvant évoqués dans des contextes différents (sociologie du droit, droit nouveau, philosophie du droit, histoire du droit, droit comparé) ou même dans le cadre de régimes de droit distincts, ils révèlent manifestement leur polysémie.
À cet égard, les manuels, les traités, les monographies, les vocabulaires, la littérature juridique, sont, certes, d’une importance inestimable, mais, leur objet étant particulier, ils deviennent, pour cette raison seule, d’une utilité limitée.
Malgré pareilles embûches, peut-on, d’une façon claire et définitive, circonscrire suffisamment les usages du mot droit pour permettre de bien comprendre l’emploi qu’en font les spécialistes?
Dans une première approche, il convient de considérer ce que ce mot signifie, comment il se qualifie selon ses matières ou son objet et quelles locutions il sert à former.
Première constatation : la multiplicité des définitions. Suivant les conceptions et compte tenu des diverses écoles de pensée, on trouve des définitions courantes, des définitions juridiques et non juridiques, des définitions descriptives et des définitions axiomatiques du mot droit. Toutefois, il est permis d’affirmer que, malgré les multiples conceptions des théoriciens et des écoles, tous reconnaissent d’emblée que, considéré au sens large, le droit est une discipline, mieux, la science qui ordonne de par son objet principal l’ensemble des principes et des règles de conduite obligatoires gouvernant ou régissant les rapports des individus en société, l’ensemble des commandements, des préceptes qui règlent l’activité humaine et qui sanctionnent les contraintes sociales.
Le droit édicte des normes de conduite : par exemple, quiconque cause un dommage ou un préjudice doit le réparer. Ces règles étant à caractère normatif et, donc, étant coercitives, nul ne peut y déroger sans encourir de sanctions. En revanche, quiconque s’estime lésé ou entend faire reconnaître son (bon) droit peut recourir à la loi pour obtenir justice.
Par conséquent, dans son acception générale et première, le droit est un ordre, un système juridique dans lequel s’organise un ensemble ou un corps de règles destinées à régir ou à réglementer soit des rapports entre les personnes et les institutions, soit des comportements ou des conduites. En ce sens, le mot droit s’entend des règles juridiques. Par exemple, l’ignorance du droit est illustrée dans la maxime Nul n’est censé ignorer la loi, autrement dit, la méconnaissance du droit (= des règles de droit) n’est pas une excuse. Ou encore, le droit se conçoit comme correspondant à la loi. Par exemple, le juge dit le droit parce qu’il est tenu de le connaître et il l’applique d’office parce que c’est là son devoir. C’est un attribut de sa fonction que de fonder sa motivation sur les règles de droit.
À l’image d’un arbre immense, le droit lui-même comme science se divise en branches maîtresses (les divisions du droit), chacune étant constituée de multiples branches secondaires, ou rameaux, représentant les domaines de chaque matière. Ainsi, le droit civil forme une partie du droit que l’on peut définir comme l’ensemble des règles régissant aussi bien les personnes que les biens, les obligations, la famille et les sûretés. Chacune de ces matières de régulation sociale et d’enseignement constitue un domaine du droit civil : le droit des personnes, le droit des biens, le droit des obligations et des contrats, le droit de la famille et des régimes matrimoniaux, le droit des testaments et des successions ainsi que le droit des sûretés.
Chacun de ces domaines comporte des sous-domaines, soit les matières de tous ces droits, le droit des biens, par exemple, ayant ses propres divisions et sous-divisions.
Le droit peut être envisagé sous des éclairages différents. Les distinctions s’établissent à partir des adjectifs qui qualifient le mot droit, lequel se conçoit généralement à partir d’une vue dualiste de la réalité du droit, dans des perspectives doubles : celle, par exemple, de l’obligation (le respect des règles) et de la prérogative (le recours à la justice), celle qui présente une autre dichotomie : le droit naturel et le droit positif.
Ainsi dit-on que le droit positif est l’ensemble des règles de droit en vigueur dans une société donnée; il est consigné dans des textes : le droit positif est donc un droit écrit. Par contraste, le droit naturel ou idéal est inscrit au cœur de la nature humaine : il existe au-delà de toute formulation précise, vu son caractère hautement moral : le droit naturel est un droit non écrit. Quiconque sait d’instinct qu’on ne peut pas tuer autrui impunément, qu’on est sur la terre pour y vivre et y mourir, d’où le droit à l’existence, le droit à la vie, le droit à la santé, le droit à la dignité et à l’intégrité de sa personne.
Par l’adoption d’une autre démarche de la pensée, on est fondé à dire que le droit est à la fois objectif et subjectif. Le droit objectif (dans objectif il y a objet) établit dans ses normes un rapport entre les sujets de droit et un objet, la règle de droit, un lien qui les unit entre eux, ainsi que l’ensemble des règles (obligations et contraintes) qui régissent l’organisation et le fonctionnement de la société, de l’État.
Le droit subjectif (dans subjectif il y a sujet) s’intéresse, au contraire, à la personne du sujet de droit. Il confère un ensemble de prérogatives, de facultés (et donc de droits) aux personnes, qu’elles soient physiques (les particuliers) ou morales (les groupements, les associations, les sociétés).
Par conséquent, tous les droits découlant de la personne relèvent du droit subjectif, tandis que les droits ressortissant à l’objet des principes qui règlent la conduite humaine dans les rapports sociaux se rattachent nécessairement au droit objectif.
Par opposition au droit naturel ou idéal (qui est inscrit dans la nature humaine), le droit positif regroupe toutes les règles de droit qui sont en vigueur dans un État ("substantive law") et tous les droits substantiels ("substantive rights"). Il se distingue du droit procédural, celui grâce auquel on peut jouir en toute égalité des droits, des privilèges et des immunités fondamentales et assurer leur mise en œuvre dans le cadre du droit d’agir en justice, lequel permet de faire valoir ses droits en conformité avec les règles du droit judiciaire et, plus généralement, du droit régissant le procès équitable considéré dans ses assises principales que constituent les théories de l’action judiciaire, de la juridiction et de l’instance ou droit processuel.
On appelle droit commun l’ensemble des règles juridiques édictées par l’autorité publique. Elles visent les sujets de droit, par opposition aux dispositions spéciales qui s’appliquent à des cas particuliers, dits exorbitants du droit commun.
Vu sous un autre angle, est public le droit qui concerne l’organisation des collectivités, y compris l’État, et leurs rapports avec les particuliers, et est privé le droit qui organise les rapports juridiques ne mettant en cause que les individus. Si les règles visent les États entre eux, on parle de droit international public, et si elles s’appliquent aux particuliers dans leurs rapports avec un État étranger, on parle plutôt de droit international privé.
Par ailleurs, les règles de droit sont le plus souvent purement pratiques. Elles se trouvent énoncées, expressément ou implicitement, dans les lois, dans la jurisprudence, dans la doctrine et dans la coutume. Ce sont là ce qu’on appelle les sources du droit. Elles peuvent être du droit non écrit (comme dans le cas des usages et des habitudes formant la coutume) ou du droit écrit (comme dans les lois et les décisions de justice) et se divisent en sources formelles et en sources informelles ou réelles du droit.
Cette pensée s’abreuve à deux sources fondamentales du droit : les sources réelles ou informelles, soit tous les éléments de l’activité humaine qui concourent par l’établissement de leur propre système à la création des règles de droit et à l’évolution du droit, telles les activités socioéconomiques et politiques, ainsi que les sources formelles du droit, soit l’ensemble des manifestations de ce qu’on appelle la production du droit : la loi, la jurisprudence et la coutume.
Le droit considéré comme une science correspond à l’élaboration permanente de la pensée juridique, de la connaissance technique du droit. Il est formé de deux disciplines complémentaires : les sciences appliquées du droit, qui étudient les catégories juridiques, ses concepts, ses théories, et la science de la législation, de même que les sciences dites auxiliaires du droit que sont les disciplines qui participent au développement interdisciplinaire de la science du droit, soit l’histoire du droit, le droit comparé, la philosophie et la théorie du droit, l’anthropologie juridique, la criminalistique, l’information juridique, et ainsi de suite.
Que l’on considère les sources du droit dans une acception large, comme le font les systèmes de common law, ou dans une acception stricte, comme le font les systèmes romanistes européens dits systèmes civilistes, un fait demeure : le droit objectif repose sur des sources différentes.
Dans les systèmes civilistes, le droit objectif est doté de sources réelles et de sources formelles. Les sources réelles comprennent l’ensemble des facteurs extrajuridiques qui influent sur le droit positif, qui lui donnent son impulsion, qui le modifient en profondeur ou qui contribuent, chacun à sa manière, à son développement : facteurs économiques, politiques, sociaux et moraux.
Aux sources réelles les systèmes civilistes opposent les sources formelles ou productrices du droit que constituent la loi (la Constitution, les lois et leurs règlements d’application, les décrets, arrêtés et circulaires) et la coutume exclusivement.
Elles sont consignées dans des recueils, des ouvrages, des registres d’actes instrumentaires. La jurisprudence et la doctrine ne sont pas des sources formelles, mais des sources historiques du droit. « Dans notre système juridique, écrit Cornu, la définition précise donnée à la source formelle ne permet pas d’étendre cette qualification à la jurisprudence et à la doctrine (…) car (…) ce qui sort de la plume du juge ou de l’auteur, au moment de la décision ou de l’avis, ce n’est pas, à la source, un élément constituant de l’ordre juridique, un morceau de droit positif émanant d’une volonté dotée du pouvoir autonome d’en décider. Aucun juge ne donne, par décision, l’être à une règle. Même dans le silence de la loi, il invoque le droit, il le dit : donc il s’y réfère. »
Pour les systèmes de common law, le mot source dans ce contexte conserve son caractère métaphorique et s’entend des textes qui produisent le droit. Les sources formelles maîtresses qui font jaillir le droit sont, par ordre d’importance, la jurisprudence (le droit produit par les juges), la législation (les lois et leurs règlements d’application), la doctrine et la coutume. Le juge d’abord, puis le législateur non loin derrière depuis la fin du XIXe siècle, l’auteur d’ouvrages doctrinaux et le groupe social sont eux aussi des producteurs de droit. C’est dans les règles qu’ils édictent, qu’ils dégagent ou créent, qu’ils conçoivent ou qu’ils perpétuent, selon le cas, que se trouve la norme de droit. En tant que manifestations concrètes des sources formelles du droit, les règles légales, jurisprudentielles, doctrinales et coutumières sont des règles de droit.
Pour certains juristes, les systèmes de common law considèrent les données documentaires, la révélation transmise par la culture judéo-chrétienne et la philosophie juridique comme des sources formelles secondaires du droit.
Les sources formelles du droit international sont les conventions internationales, les traités, les chartes, les protocoles et la coutume des nations, la jurisprudence internationale et tous les principes de droit reconnus par la plupart des droits nationaux.
Pour les systèmes civilistes comme pour la common law, les sources de droit positif sont diverses : les contrats, les quasi-contrats, les délits civils, les conventions collectives, et ainsi de suite.
Ainsi, la source du droit fait naître le droit objectif, tandis que la source de droit (ou d’obligation) est tout élément qui produit des règles relevant du droit subjectif, tout fait ou phénomène, toute institution ou situation ou tout régime ou principe qui se trouve à l’origine d’une prérogative individuelle reconnue et sanctionnée par le droit subjectif.
Dans une perspective évolutive, il est permis de distinguer, grosso modo, trois grandes époques dans cette évolution. Il y a d’abord l’époque du droit féodal. Le droit se fonde alors essentiellement sur le statut (les nobles jouissent de droits en raison de leur statut personnel).
Puis, au milieu du XVIIe siècle naissent l’État-nation et un nouvel ordre juridique dans lequel le droit confère des droits à l’être humain non plus en raison de son statut ou de sa nature d’être humain supérieur à d’autres êtres humains, mais uniquement comme sujet, le sujet de droit.
Quand les colons français et anglais s’établissent dans le Nouveau Monde, ils sont considérés comme des sujets britanniques. À partir de la Déclaration d’indépendance américaine du 4 juillet 1776, ils ne revendiquent plus de droits en tant que sujets britanniques, mais ils prétendent à la reconnaissance de droits de la personne qui existent indépendamment de tout gouvernement. Le concept de droits de la personne (de droits de l’homme, de droits des êtres humains) remplace alors celui de droits des sujets.
Enfin, les droits sont reconnus et garantis à l’égard de la personne. Aujourd’hui, les droits de la personne sont à l’avant-scène des grands textes juridiques, des chartes et déclarations des droits et libertés, tel le droit au respect de la vie privée, garanti à la fin du XIXe siècle et dans les limites de l’époque par le Quatrième Amendement de la Constitution américaine et restreint aux atteintes exercées par la force publique.
Dans l’optique des droits subjectifs, de ceux qui appartiennent au sujet de droit, au titulaire, au bénéficiaire d’un droit, une phraséologie s’élabore : chaque mot a un sens précis. En matière juridique, la précision terminologique est de rigueur. C’est la nature de la matière, de la discipline même du droit qui l’exige. Les vocabulaires juridiques, les dictionnaires de droit, les encyclopédies du droit ont pour objet principal de fixer les acceptions de termes le plus souvent polysémiques.
La phraséologie juridique s’intéresse aux tournures typiques de la langue du droit; par l’usage particulier des figures de style, de locutions diverses et de formes grammaticales et syntaxiques créant un effet de surprise, elle revêt un caractère unique et donne au langage du droit sa spécificité, sa juridicité.
Un droit (subjectif) naît, est créé, constitué (légalement), est protégé (juridiquement), il est mis en œuvre et, en cela, il se réalise. Il peut devenir caduc : on dit alors qu’il s’éteint. Selon le point de vue sous lequel on le considère, ce droit est apparenté à un pouvoir (un droit réel confère à son titulaire un pouvoir sur une chose), à une prérogative (le droit subjectif est une prérogative reconnue à une personne par le droit objectif pour la satisfaction d’un intérêt personnel) : « Le titulaire du droit réel n’est pas toujours doté, sur cette chose, des mêmes prérogatives. », à une faculté (un droit de créance ou droit personnel ouvre à son titulaire la faculté d’exiger d’une autre personne une certaine prestation), à une liberté, à un intérêt, à une aptitude, à une capacité.
Un droit est établi par une règle, la règle de droit. Celle-ci commande de respecter, d’observer ce droit. Elle affirme l’existence d’un droit (affirmation d’un droit). L’individu est investi du pouvoir de faire reconnaître son droit dans une action en justice, celui d’en obtenir l’exécution forcée par les voies de droit que lui ouvre la loi. La force du droit se manifeste dans les sanctions qu’il applique en cas d’inobservation ou de violation des règles édictées. Dans le règlement des relations qu’entretiennent les individus entre eux, sa finalité vise à faire régner l’ordre public et la paix sociale.
L’individu est assujetti à des droits et à des devoirs (c’est là le point de vue du droit des obligations), mais il jouit, en contrepartie, de droits et de libertés (c’est là le point de vue du droit de la personne).
Le droit individuel (par exemple, le droit de propriété et tous les droits de la personnalité) peut s’opposer, en un sens, au droit personnel, lequel se fixe sur la tête d’une personne par rapport à une autre sans porter sur une chose, comme le droit réel, dont le support est un bien; dans un autre sens, il s’oppose au droit collectif (par exemple, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, le droit appartenant à un groupe ou à une nation).
Ainsi, le droit réel (du latin res signifiant chose) porte sur une chose, le droit réel par excellence étant le droit de propriété. Son titulaire possède un pouvoir direct sur elle. « Le titulaire d’un droit de propriété ou d’un autre droit réel jouit de la faculté d’agir en justice pour faire reconnaître ce droit. » On qualifie de personnel le droit qui confère une prérogative sur une autre personne. Ce droit s’attache à la personne, il la suit partout où elle va : tel le cas du droit à son nom, à son image, à sa vie privée, à son corps, à son identité, à sa personnalité.
Le droit de créance n’est pas un [droit réel]; c’est un droit personnel puisqu’il attribue au créancier le pouvoir d’exiger du débiteur l’exécution d’une prestation. Le droit réel est donné sur une chose, le droit personnel est attribué à l’encontre d’une personne et non d’une chose.
De cette manière, une chose comme une personne peuvent faire l’objet d’un droit. On dit que le droit réel met son titulaire au contact d’une chose, tandis que le droit personnel le met au contact d’une personne. Le titulaire d’un droit réel a le droit d’usage, le droit d’user de la chose (de s’en servir), le droit de jouissance, le droit d’en jouir, et le droit de disposition, le droit d’en disposer, au sens large encore appelé, au sens restreint, droit d’aliénation, droit de l’aliéner, soit en la vendant, en la cédant, en la transférant, en la donnant ou même en la détruisant.
Un droit confère des pouvoirs de la même manière que des opérations juridiques confèrent des droits. Il est accordé, attribué, adjugé.
Aussi un droit s’établit-il entre son titulaire et la chose ou entre lui et une autre personne, l’obligé, créant de la sorte un rapport juridique, un lien de droit, autrement dit une obligation.
Le droit peut être de différents ordres : pécuniaire, intellectuel, moral, psychologique, matériel, politique ou social.
Le sujet de droit possède des droits. Pour cette raison, des auteurs parlent plutôt du sujet de droits. Ce sujet peut être investi d’un droit (l’investiture) ou l’acquérir (l’acquisition).
Peut être réel ou personnel le droit dit patrimonial. Ce droit comporte pour son titulaire un avantage en argent, il représente une valeur économique, comme l’illustre le droit d’auteur, droit exclusif d’un créateur d’une œuvre littéraire ou artistique d’en tirer tous les avantages et toutes les utilités. Au contraire, un droit est qualifié d’extrapatrimonial quand, étant hors du patrimoine d’une personne, il n’a pas de valeur pécuniaire, on ne peut l’évaluer en argent, il est hors commerce, comme certains droits familiaux et matrimoniaux, les droits de la personnalité et les droits moraux. Par exemple, s’agissant des droits de la famille, le droit extrapatrimonial de l’autorité parentale concernant la garde, la surveillance et l’éducation de l’enfant n’a pas de valeur monétaire, s’agissant des droits matrimoniaux, celui des époux au respect et à l’affection réciproques, ou le droit à son corps comme droit moral.
Un droit peut être plénier ou il peut être démembré. Dans le premier cas, sa qualité principale, son attribut constitutif est d’être plein, sa plénitude fait de lui un droit entier, comme il arrive dans le cas de la pleine propriété. Le droit de propriété confère à son titulaire tous les attributs de ce droit, c’est-à-dire tous les droits constitutifs qui contribuent à la formation de ce droit complet : le droit d’usage, le droit de jouissance et le droit de disposition de la chose. S’il n’est pas plénier, il est alors qualifié de droit démembré puisqu’il ne confère que certains attributs et non pas tous les trois.
Par rapport à un droit dit principal, le droit accessoire donne à son titulaire le moyen ou la garantie d’en assurer la réalisation, tel le droit de sûreté ou de garantie de paiement attribué au créancier, droit constituant l’accessoire de la créance.
Tandis qu’un droit impératif commande péremptoirement l’exécution obligatoire d’une prestation, un droit qui ne présente pas ce caractère d’urgence et de contrainte d’un droit contraignant, un droit représentatif (par opposition au droit mou ou vert) ne comporte pas en lui l’idée d’un pouvoir auquel il faut se soumettre nécessairement; tel est le cas du droit que confère un mandat impératif par opposition à celui qu’attribue un mandat purement représentatif.
Un droit peut être transmissible ou intransmissible, saisissable ou insaisissable (tel le droit à des biens de toute première nécessité), cessible ou incessible, encore qualifié d’indisponible (ne pouvant être transmis à un tiers durant la vie de son titulaire). « Le droit à une pension alimentaire est indisponible parce qu’il est de son essence d’être finalisé par le besoin personnel qu’en éprouve son titulaire. »
Un droit viager dure du vivant de son titulaire, tel le droit à une rente qualifiée de viagère, un droit dit perpétuel ne s’éteint pas au décès, étant établi à jamais, telles, en ce sens, la propriété et l’hérédité.
Juridiquement parlant, le bénéficiaire peut jouir de son droit puisque, à ce titre ou en cette qualité, il est apte à en devenir le titulaire, lequel a pouvoir et capacité de l’exercer. En cas de précarité d’un droit, on parle du détenteur du droit.
On a un droit, ce droit nous appartient, nous le possédons. Un droit est acquis ou dévolu. « Les lois qui portent atteinte aux droits dévolus ou acquis doivent recevoir une interprétation stricte. » Est maître de ses droits la personne qui s’avère pleinement apte à les exercer, qui est capable sans réserve de tous les actes de la vie civile.
On peut céder son droit, le concéder, le transférer, le transporter : on peut en disposer, l’aliéner à son gré. Affecter, brimer, léser, toucher les droits de quelqu’un, leur porter atteinte. Atteindre, blesser, toucher qqn dans ses droits, c’est le léser dans ses droits. Toute atteinte à l’exercice d’un droit est un trouble, tels les troubles de la possession, de fait ou de voisinage. On ne dit pas d’une personne qu’elle [a des droits à l’encontre d’un tiers], mais, plutôt, que ses droits lui sont opposables. « Le changement de propriété du bien ne pourra d’aucune façon ni toucher ni léser les droits du créancier hypothécaire opposables au débiteur hypothécaire ou à quiconque sera tenu de rembourser les frais garantis par l’hypothèque. » Si on entend opposer son droit à quelqu’un, il faudra s’adresser à l’autorité judiciaire et lui demander de statuer sur ce droit, sur sa validité.
Accorder la maintenue d’un droit signifie assurer le maintien ou la validité d’un droit par confirmation judiciaire. « Le tribunal a accordé au demandeur la maintenue de son droit de possession. »
Lorsque des droits sont contestés devant les tribunaux, on les revendique; on ne peut réclamer des droits que si ceux-ci s’entendent dans leur acception monétaire ou financière.
On demande au tribunal de faire droit à des prétentions, à une demande. On prétend à des droits lorsque la prétention porte sur le fait que l’on croit avoir le droit d’en être reconnu ou déclaré titulaire. Le tribunal fait droit à des prétentions quand le demandeur ou le requérant, selon le cas, est dans son droit, dans son bon droit : il leur fera droit, il ne leur [donnera] pas droit. Avant de reconnaître la validité des droits revendiqués, le juge fera apparaître le droit, c’est-à-dire qu’il énoncera le droit substantiel pertinent, il dira le droit en la matière en se prononçant sur les règles de droit qui régissent l’objet de la demande ou de la requête.
On ne peut exercer ses droits, en jouir et en tirer avantage ou profit que dans la mesure où ils sont garantis par la loi, reconnus par elle ou par l’autorité de justice. Reconnaître un droit signifie admettre officiellement son existence juridique. Une fois son droit admis, on ne peut être troublé ou inquiété dans l’exercice de celui-ci. Est remplie de ses droits la personne qui parvient à faire reconnaître l’entièreté de ses droits. Par exemple, l’attribution ou l’abandonnement est une opération juridique qui permet d’attribuer à un indivisaire à titre de partage les biens lui permettant d’être rempli de ses droits (voir ci-après au point 17).
Pour concrétiser son droit, il importe de suivre une procédure fixée par la loi; ainsi en est-il des titulaires de privilège et des créanciers. Dans le cas de ces derniers, pour pouvoir recouvrer leurs créances, ils doivent concrétiser leur droit de recouvrement en se conformant à la procédure prévue à cette fin.
Si on abuse de son droit, si on l’abandonne, on risque de le perdre, le tribunal pourra l’annuler, l’abolir, le supprimer. Les droits qui sont anéantis du fait qu’on en a mésusé pourront être rétablis ou reconfirmés dans le cadre d’une révision judiciaire ou d’un appel. Être rétabli dans ses droits. Conserver, garder ses droits.
Un droit s’éteint quand son exercice prend fin dans le temps. La résurrection d’un droit s’entend du fait, pour la loi, de faire revivre un droit éteint. « Une loi qui étend un délai ne sera généralement pas appliquée à faire revivre un droit éteint avant son entrée en vigueur. » « L’application de cette loi nouvelle implique la résurrection d’un droit auparavant aboli. » Doctrine de l’extinction d’un droit ancestral par la voie législative. Résurrection du droit naturel. Résurrection d’un droit impérial tenant en échec le droit international.
Un droit peut survivre à la suite d’une décision visant à le faire disparaître, tel un droit ancestral présumé avoir survécu à l’imposition d’un régime colonial.
Le droit que son titulaire peut céder est dit cessible par contraste avec le droit incessible.
On dit d’un droit qu’il est concret quand il se modèle sur les réalités du domaine dont il relève, tel, pour le droit du travail, le droit à indemnisation en cas d’accident du travail.
Le droit contingent varie avec le temps. En ce sens, il est dit droit en situation : il évolue rapidement jusqu’au moment où il devient caduc ou périmé. Au droit contingent il convient d’opposer le droit permanent.
Le droit dont l’état est complet dans toute sa force est plein, il a atteint sa plénitude. S’il est incomplet, s’il présente des lacunes, il y aura lieu d’assurer son complètement.
On qualifie de simple ou de nu le droit qui ne comporte qu’une seule faculté et qui demeure une aptitude à la titularisation. Simple droit d’entrée. Par exemple, on peut n’avoir qu’un simple droit de jouissance sur un bien, ce qui exclut l’exercice de ce droit, l’usage effectif qu’on fait de ce bien, son administration ou le profit qu’on en tire.
Dans le droit des biens en régime de common law, le titulaire d’un simple droit de propriété sur un bien corporel n’a ni possession de ce bien ni droit de possession sur celui-ci.
Les droits dérivés se disent par opposition aux droits propres. Dans le droit du travail, le salarié bénéficie d’un droit propre qui lui permet d’obtenir la prise en charge par les organismes sociaux des prestations auxquelles il a droit. Sa famille, par ailleurs, pourra bénéficier de droits dérivés dans la mesure où elle ne bénéficiera des prestations sociales qu’en raison seulement de ses liens familiaux avec lui (le conjoint, l’enfant, l’adulte à charge est titulaire, à ce titre, de droits dérivés). Dans d’autres domaines du droit, le terme droit dérivé aura une acception apparentée et on le désignera aussi sous le vocable de droit indirect par opposition au droit direct.
Le droit que l’on peut contester en justice est attaquable. Tout droit dit incontestable dont jouit une personne est de ce fait inattaquable. Le droit manifeste est l’antonyme du droit apparent. Le droit formel est assujetti à des formalités, à des conditions de forme, contrairement au droit informel.
Le droit conditionnel est subordonné à une ou plusieurs conditions, ce qui n’est pas le cas du droit absolu. Dans le droit des biens en régime de common law, le droit absolu de propriété s’oppose au droit relatif de propriété, le propriétaire ne détenant pas dans ce dernier cas la totalité des droits sur le bien, une autre personne en ayant la possession ou le bien étant grevé. Le droit consommé se conçoit par opposition au droit virtuel, le droit corporel, au droit incorporel, le droit actuel, au droit futur, le droit dépendant, au droit indépendant, soit celui qui ne dépend d’aucun autre droit, dont l’effet n’est subordonné qu’à sa seule existence, le droit conjoint, en matière de tenance conjointe, au droit individuel, le droit possessoire, soit le droit à la repossession physique d’une chose, au droit non possessoire, et le droit propriétal, à savoir le droit exclusif et absolu à la propriété d’une chose, au droit non propriétal, le droit unique, au droit commun, le droit réel dont jouit une personne sur un bien, c’est-à-dire d’un intérêt opposable à quiconque, erga omnes, au simple droit personnel opposable à certaines personnes seulement.
Dans le droit de la propriété littéraire et artistique, aux droits patrimoniaux et pécuniaires accordés à l’auteur d’œuvres de l’esprit s’ajoutent des droits moraux, qui, notamment, permettent à l’auteur d’interdire toute atteinte à son œuvre qui risquerait d’entacher sa réputation ou de révéler son identité, et des droits voisins ou connexes du droit d’auteur, soit les nouveaux droits de propriété intellectuelle attribués, entre autres, aux artistes-interprètes et aux producteurs de phonogrammes et de vidéogrammes ainsi qu’aux entreprises de communication audiovisuelle. « Le terme ’droits voisins’ désigne les droits touchant la rémunération des artistes-interprètes et des producteurs pour la présentation publique, la radiodiffusion, la location ou la reproduction de leurs prestations ou de leurs enregistrements sonores. » « Les droits voisins reposent sur le principe selon lequel l’exécution d’une œuvre crée une œuvre ’voisine’ qu’on appelle une ’prestation d’artiste-interprète’. »
Le bon droit est ce que l’on considère conforme à l’idée du droit. La locution être dans son bon droit signifie que l’on estime que l’acte que l’on a accompli est reconnu par le droit comme étant juridiquement valable. Exciper 1 et 2 de son bon droit. Prouver son bon droit, c’est prouver son innocence (en matière pénale) ou se justifier d’une accusation infondée ou non fondée.
La locution à bon droit est d’usage dans la langue courante. Dans le langage du droit, elle signifie que l’on accomplit un acte à raison, à juste titre. La référence est étrangère au fondement juridique comme tel, reposant, au contraire, sur un ordre de justification. Une personne décide à bon droit de faire quelque chose et elle s’estime tout à fait justifiée dans son action.
Dans un contexte procédural, à bon droit signifie régulièrement, en bonne et due forme, conformément aux règles établies. Déduire, énoncer à bon droit. Invoquer le bon droit. Conclure à bon droit, au bon droit de quelqu’un. Statuer à bon droit. Voir d’autres précisions au point 17).
L’antonyme de cette locution est à mauvais droit. « L’appelant soutient que le juge a mal interprété le droit relatif à la possession et, à mauvais droit, l’a déclaré coupable. » Arrêt à mauvais droit (= mal décidé). Pouvoir exercé à mauvais droit.
Les locutions être dans son bon droit et être dans son droit sont synonymes. Elles supposent qu’on a le bon droit pour soi, qu’on a raison, qu’on a le droit d’agir comme on le fait. Elles ont pour antonymes les expressions être dans son tort, avoir tort.
Être fort de son bon droit signifie que l’on trouve sa force, son assurance dans son bon droit, dans son innocence. « Fort de son bon droit, il restait stoïque sous les injures. »
La locution par droit de met en évidence le fondement d’un droit, de succession par exemple (par droit d’hérédité) ou la source d’un état (par droit de filiation) ou encore le mode d’acquisition de la propriété (par droit d’accession).
Un droit est juste (un juste droit) quand il est légitime aux yeux de la loi, son triple attribut étant la licéité, l’équité et la raisonnabilité, le bon droit et le juste droit étant souvent associés dans la pensée : droit juste et bon.
En matière d’acquisition de propriété, on dit du droit du nouveau propriétaire qu’il est neuf pour signifier qu’il est libre, débarrassé de toutes les charges susceptibles de le grever entre les mains de l’ancien propriétaire. Par exemple, même s’il était alourdi d’un grèvement avant son acquisition, le bien nouvellement acquis n’empêche pas son acquéreur de recevoir un droit neuf, une propriété pleine et entière. De même, le droit du nouveau créancier, dans la transmission des titres négociables, est qualifié de neuf parce qu’il est dépouillé de tout ce qui pouvait entacher le droit du cédant.
Le terme droits civils (le plus souvent au pluriel) désigne l’ensemble des prérogatives, des pouvoirs et des avantages attachés à la personne, tels le droit au respect de la vie privée et de la vie familiale, le droit au respect du domicile et au respect de sa correspondance, le droit à la liberté et à la sûreté de sa personne, le droit à la liberté de pensée, de conscience, de religion, d’expression, bref à la plupart des droits et libertés fondamentaux. Il faut se garder de le confondre, quand il est employé au singulier, avec le terme droit civil, soit le système propre aux pays de tradition romaniste, c’est-à-dire l’ensemble des règles juridiques concernant, pour l’essentiel, les personnes, la famille, les biens des particuliers et les modalités de transmission de ces biens entre les personnes.
Un droit est qualifié de strict lorsque son interprétation doit être étroite, sous extension analogique d’un texte à des cas non assimilés à la lettre de ce texte, tels le droit pénal et les lois d’exception. Par exemple, une loi sur les mesures de guerre est de droit strict dans son interprétation.
Il est extrême dans tous les cas d’abus de droit. L’usage d’un droit peut être abusif et engager la responsabilité de son titulaire qui cause ainsi un dommage ou un préjudice à autrui. Le droit extrême est exercé dans l’unique intention de nuire.
Un droit négatif est un droit de ne pas faire quelque chose par opposition au droit positif ou permissif qui permet de faire. Il ne faut pas confondre les droits positifs avec le droit positif, lequel regroupe l’ensemble des règles de droit en vigueur au sein d’une autorité législative.
Par ailleurs, un droit passif ne peut être exercé que si sont fournis ou prévus les moyens permettant cet exercice, sans quoi il demeure passif. Le droit qualifié d’actif est son antonyme : il peut s’exercer parce que des moyens d’exercice sont mis à la disposition de son titulaire.
Les auteurs de travaux de sociologie du droit portant sur le droit mou se proposent de retracer ces manifestations du droit dans des textes de droit civil, de droit social, de droit commercial, de droit de l’environnement, de droit du travail, de droit national, international et communautaire où se trouvent un nombre croissant de règles de droit présentant un caractère et des concepts mous.
La question du droit mou suscite une réflexion sur l’éclatement des sources du droit, sur l’évolution du droit conduisant à la mondialisation du droit, sur la nécessité d’un nouvel ordre juridique mondial et sur les producteurs de ce droit. Les auteurs de la norme molle exercent leur activité tant au sein de l’autorité publique que des pouvoirs parapublics et des groupes d’acteurs privés, faisant ainsi ouvertement concurrence au législateur, autrefois l’auteur exclusif de la norme de droit.
Le droit mou apparaît quand des lois pertinentes sont inexistantes ou mal adaptées à la réalité (droit de l’Internet par exemple) ou que des textes doivent suppléer soit l’absence de normes dans un domaine d’activité nouveau ou particulier, soit le retard des normes édictées à passer au stade de la mise en œuvre du fait, entre autres, du phénomène de l’inflation législative. Le droit mou est une forme atténuée de non-droit ou de quasi-non-droit (voir ci-après).
Au droit mou on oppose naturellement le droit dur ("hard-law"), celui qui émane de l’État, dans des codes criminels ou pénaux, dans les lois dont des dispositions prévoient des sanctions comminatoires et impératives. C’est le droit classique, le droit fondé sur les interdictions, les prohibitions, les peines et les contraintes.
En matière de réglementation et d’exécution des normes du travail au Canada, le droit dur renvoie au rôle coercitif de l’État, le droit mou, à son rôle persuasif axé sur la nécessité de la conformité. Le modèle de l’exécution de la loi et de l’arsenal des peines ressortit au droit dur et le modèle de conformité et des mesures incitatives, au droit mou.
La notion de droit mou doit être mise en parallèle avec la réflexion des animateurs et des tenants de la théorie et de la sociologie du droit, notamment du doyen Carbonnier dans son ouvrage Flexible droit, ainsi que de l’anthropologie du droit sur les normes floues, droits indéterminés aux contours imprécis.
Ce thème du droit flou ("fuzzy law") a été abordé concurremment par les spécialistes de la rhétorique juridique (par Chaïm Perelman, notamment, le père de la rhétorique juridique moderne) dans des travaux séminaux consacrés aux notions floues du droit, source d’insécurité juridique et d’inégalités.
En somme, le droit, nous montre-t-on, devient de plus en plus mou et flou.
Les anthropologues juristes adoptent la même perspective à propos du droit flexible, corollaire du droit mou, du droit flou et de la zone de non-droit : il comprend l’ensemble des dispositions législatives qui n’ont aucune portée normative certaine. Ce droit, constitué de règles sans force obligatoire fondées en partie sur la promotion des droits-créances, a essentiellement pour objet de prescrire des conduites et des comportements sans rendre leur sanction obligatoire, ce qui a pour effet, entre autres, de forcer le juge à décider seul, dans le silence de la loi, du caractère exécutoire ou non d’une disposition. « Un texte crée du droit mou quand il se contente de conseiller, sans poser d’obligation juridiquement sanctionnée. »
L’anthropologie juridique enseigne que trois principes sont à la base du droit mou : le principe de prudence, le principe de précaution et le principe de nécessité. L’ensemble des textes non normatifs rédigés sous forme de voeux pieux (emploi de verbes tels que promouvoir et favoriser au lieu de garantir) et au moyen de formules vagues, parfois vides juridiquement, rend difficile pour les tribunaux leur mission de dire le droit avec certitude, les règles et les normes étant trop vagues.
À ces trois archétypes correspondent des façons d’envisager le droit, des philosophies du droit, des mécanismes de contrôle et des sanctions. Ce droit tripode implique, entre autres, l’adoption de langages du droit distincts dans lesquels le droit monolithique fait place au multijuridisme. Il repose sur trois fondements bien établis : les normes générales et impersonnelles, les modèles coutumiers de conduites et de comportements ainsi que les systèmes de dispositions durables appelés dans la terminologie de Pierre Bourdieu des habitus, lesquels auront des effets jurilinguistiques aussi bien sur le vocabulaire du droit que sur son énonciation.
Étant énoncés dans les préambules ou les dispositions déclaratives de ces textes, on dit que ce sont des droits constitutionnels, des droits égaux et inaliénables dont jouissent tous les membres de la famille humaine. Par exemple, s’agissant des droits de la personnalité, on parlera de droits tels le droit à la vie, à l’inviolabilité et à l’intégrité de sa personne, le droit au respect de son nom, de sa réputation et de sa vie privée. Tous ces droits ne pouvant être cédés à quiconque et étant attachés à sa personne, on les qualifie pour cette raison de droits incessibles.
Les termes qui se regroupent sous cette catégorie locutionnelle relevant aussi bien du droit civiliste que de la common law font apparaître nettement le jeu de la concurrence ou l’opposition juridique naturelle et commune du fait et du droit.
La locution en droit se dit elle aussi par opposition à la locution en fait. Elle signifie légal par contraste avec effectif, le fait étant un acte effectif ou positif. Restriction en droit, restriction en fait.
Au sens large, en droit signifie selon ce que la loi prévoit (être responsable en droit, c’est-à-dire aux yeux de la loi), selon ce qui est établi en droit (l’erreur en droit, à distinguer de l’erreur de droit). « Est abusif ce qui est non fondé en droit. » Préjugé en droit.
En common law, est dit en droit ce qui est "at law". Position juste et soutenable en droit. Mais on ne dit pas avoir le droit [en droit] (= "at law") de faire telle ou telle chose, mais avoir le droit en common law de le faire.
En common law toujours, cette locution s’entend de ce qui est reconnu par la common law. « La connaissance et le contrôle sont des éléments qui constituent la possession en droit. »
Dans le langage judiciaire, est dit en droit le fait pour le juge de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, et non selon des considérations d’opportunité ou en fait.
Quid juris?, formule latine courante chez les juristes, signifie Qu’en est-il en droit? Elle traduit une attitude de perplexité devant une question non tranchée par les textes et par laquelle s’amorce l’analyse des termes de la discussion en vue de dégager la solution la plus appropriée.
Dans la langue courante, en droit signifie qui relève de la discipline, de la science du droit : docteur en droit, stagiaire en droit, technicienne en droit.
La locution de droit entre dans la composition de syntagmes formés sur le modèle de la locution comme de droit, elle en est une variante créée par ellipse. Par exemple, en common law, dans le droit des biens, l’accès de droit est un accès dit, littéralement, comme de droit ("entry as of right"). « À l’article 150, l’expression ’endroit public’ est définie comme étant tout lieu auquel le public a accès de droit ou sur invitation, expresse ou implicite. »
Comme de droit signifie ainsi de plein droit, c’est-à-dire par le seul effet de la loi, du seul fait de la loi, en vertu de la loi seule ou du droit même, sans qu’il soit nécessaire de le prévoir expressément ou de le stipuler au contrat. Par exemple, par le seul effet du contrat, les parties contractantes sont de plein droit liées par ses stipulations puisque, suivant la règle de droit édictée à cette fin, il est leur loi. Être nul de (plein) droit. Le testament qui est fait après l’ouverture de la tutelle est nul de droit. « La convention contractée par erreur, violence ou dol n’est pas nulle de plein droit. »
Être membre de plein droit (= d’office, c’est-à-dire légitimement) d’une assemblée. Être applicable de plein droit. Attribuer de plein droit (la citoyenneté). Être responsable de plein droit (d’un dommage). Appel, appeler, pourvoir, se pourvoir de plein droit. Appartenir, revenir de droit. Révocation de plein droit. Perdre compétence de plein droit. Débiteur en demeure de plein droit d’exécuter son obligation. Ouverture de plein droit à un recours. Avoir lieu, se réaliser, s’opérer de plein droit. « Lorsque les dettes sont certaines, liquides et exigibles, l’extinction mutuelle a lieu de plein droit. » « Est opposable aux tiers une cession de plein droit de la créance. » « L’héritier de la chose assurée ou son acquéreur se voit transmettre de plein droit l’assurance dommages qui lui est attachée. » (= sans qu’il soit besoin d’effectuer quelque formalité que ce soit).
La locution être saisi de plein droit d’une affaire se dit pour une juridiction, tandis que la locution être saisi de plein droit des biens du défunt, par exemple, se dit de l’héritier légitime, du légataire ou de l’exécuteur testamentaire.
Jouer de plein droit. « L’indignité successorale joue de plein droit lorsque les conditions légales en sont réunies. » Produire de plein droit. « Les sommes non restituées produisent de plein droit intérêt au taux légal. » Porter intérêt de plein droit. Se produire de plein droit. « La nullité des actes de l’indigne se produit de plein droit. »
Ainsi, en common law, ce qui est comme de droit ("as of right") n’est subordonné à aucune condition qui ne relève pas d’un droit dont on est titulaire. Par exemple, la jouissance comme de droit n’est assujettie à aucune demande d’autorisation, elle s’exerce de façon continue, publique et notoire par une personne qui ne risque pas d’être considérée comme un intrus. L’usage comme de droit n’a nul besoin d’une permission ou d’une autorisation pour s’exercer.
De droit s’entend aussi par opposition à ce qui est laissé à l’appréciation souveraine du juge, à ce qui devient, dès lors, facultatif. Par exemple, dans une demande de divorce, le juge statue sur la violation de certains devoirs conjugaux selon la gravité de la situation ou les intérêts en présence et non en vertu de la loi seule, de façon obligatoire : il statue alors de droit.
De droit s’entend, enfin, de ce qui est issu des règles de droit, de ce qui découle de la force du droit ou de la loi, de ce que l’on tient d’un droit légitime, de ce qui est valable en droit. Société de droit.
Employée surtout dans la doctrine, la locution de droit désigne le droit établi : selon le droit établi, selon ce qui est de droit reconnu. Par exemple, la locution en bonne justice signifie selon ce qui est de droit, puisque la justice est la reconnaissance du bon droit de quelqu’un.
À bon droit. Cette locution signifie de façon indiquée, fort à propos, justement, correctement. Elle qualifie notamment l’interprétation qui est donnée correctement à un texte. Dans le langage judiciaire, à bon droit se dit de la décision dont les motifs prennent appui sur une appréciation exacte de ce que les parties invoquent. La locution peut s’appliquer aussi bien aux plaideurs et aux avocats plaidants qu’au juge. « Le demandeur a déposé à bon droit cette preuve documentaire. » « L’avocate a fait valoir à bon droit que la Cour était incompétente pour juger l’affaire. » « Le juge de première instance s’est prononcé à bon droit. » « C’est à bon droit que la Cour a rejeté la demande. » Conclure à bon droit. Question soulevée à bon droit. Preuve écartée à bon droit.
Comme procédé de renforcement, à juste titre, locution quasi-synonyme, accompagne parfois à bon droit sans qu’il y ait nécessairement tautologie. « Le défendeur affirme que c’est à bon droit et à juste titre que la Commission a conclu comme elle a fait. »
À qui de droit. Répandue dans la langue usuelle, administrative et commerciale, cette locution signifie littéralement à la personne qui a le droit de lire ou de recevoir ce document. En droit, son acception est apparentée à ce sens. Elle s’adresse à la personne qui est juridiquement habilitée à accomplir un acte de reconnaissance, de constatation, de jugement, d’interdiction. « Tout pouvoir est donné au porteur du présent acte pour qu’il le signifie à qui de droit. »
Dans le discours judiciaire, le juge qui se déclare incompétent pour instruire une affaire renvoie les parties à se pourvoir devant la juridiction qualifiée. Plutôt que de la désigner nommément, il y renvoie au moyen de la locution à qui de droit. « Les parties doivent s’adresser à qui de droit. »
La locution qui de droit est une variante synonymique de la locution à qui de droit. « Le délai court contre toutes personnes, même contre le mineur, sauf, s’il y a lieu, le recours contre qui de droit. »
À toutes fins que de droit. Cette locution signifie suivant toutes les prescriptions légales. « Nous aimerions souligner que l’infraction criminelle originelle subsiste, à toutes fins que de droit, même après la période d’extinction. » « La condamnation du demandeur n’est pas effacée à toutes fins que de droit. » « Le casier judiciaire n’est pas annulé à toutes fins que de droit. » « Il ne s’agit pas d’une décision définitive à toutes fins que de droit sur la nature de la cession ou de la prétendue 1 et 2 révocation. » Mise au singulier, la locution a la même signification et a pour variante à telle fin que de droit, à telles fins que de droit, c’est-à-dire suivant celle ou celles des prescriptions que prévoit la loi dans tel ou tel cas. « Cette désignation de fiduciaire a, à telle fin que de droit, le même effet que si elle relevait de l’article pertinent de la Loi. » « L’appel est rejeté à toute fin que de droit. »
Aux charges de droit. Cette locution sert de clause de style dans un acte écrit. Elle signifie aux conditions fixées par la loi pour tous les actes du même type emportant transfert de propriété tels l’acte de vente, l’acte d’échange ou la donation. On la trouve aussi dans les actes sous seings privés relatifs à la jouissance d’un bien.
Ce que de droit. Cette locution se rapporte à une preuve contenue dans un acte instrumentaire. Elle s’emploie habituellement avec les verbes servir et valoir (voir ci-après). On la trouve dans un écrit qui permet à son auteur d’attester la réalité d’un fait, d’un témoignage ou d’une opération quelconque. Elle sert à l’intéressé à prouver la vérité de ce qu’il avance; à ses yeux, elle vaut preuve de ce qu’il déclare. Clause de style bien souvent, elle ne présente alors aucune portée juridique véritable, sauf en fonction de l’autorité de son auteur. « En foi de quoi, je lui ai délivré le présent certificat pour servir et valoir ce que de droit. »
En fraude des droits. Cette locution signifie qu’une chose a été faite à l’encontre des droits de quelqu’un. « Le partage a été effectué en fraude des droits des créanciers. » « La séparation des époux a été prononcée en fraude des droits de leurs créanciers. » Loi sur les cessions en fraude des droits des créanciers. « L’acte de cession a été conclu en fraude des droits de Sa Majesté. » Faire quelque chose en fraude de quelqu’un signifie commettre une action en fraudant une personne. « L’avocat a soutiré cet argent en fraude de ses clients. » (= en fraudant ses clients, à leurs dépens.)
En garantie de son droit. Cette locution signifie qu’un sujet de droit peut exiger d’un autre une certaine garantie pour s’assurer que son droit sera sauvegardé. « L’époux peut exiger une caution de son conjoint en garantie de ses droits. »
Être maître de ses droits. Cette locution se dit de la personne qui possède la pleine capacité d’exercer ses droits civils par elle-même, sans devoir recourir à la représentation par tutelle, par curatelle ou par assistance. « Rétabli dans la plénitude de ses facultés et prérogatives, maître de ses droits, il a revendiqué, sous tutelle, l’entièreté de ses pouvoirs légitimes. »
Être nul de droit. Cette locution signifie qu’un acte ne présente plus aucune valeur aux yeux de la loi. « Les actes passés par le majeur incapable postérieurement au jugement d’ouverture de la tutelle sont nuls de droit. »
Faire droit. Cette locution s’emploie dans le langage judiciaire à propos du juge qui statue, favorablement ou non selon la préposition qui introduit le complément. Faire droit à une demande signifie accueillir, donner une suite favorable à une prétention exposée au tribunal, adjuger le bénéfice des conclusions développées. En construction absolue, faire droit signifie faire bonne justice et renferme un jugement de valeur. Faire droit sur la demande signifie exercer le pouvoir juridictionnel à propos de la cause soumise. Cette locution est l’antonyme de la locution dénier justice et il ne faut pas la confondre avec la locution dire le droit, qui signifie que le juge se prononce sur le fond de l’affaire dont il est saisi.
Quant à la locution faire reste de droit, elle est synonyme de faire droit. Le tribunal fait reste de droit ou fait droit quand, dans la rédaction de ses motifs, il signale qu’il rejette un argument à lui présenté qui ne lui paraît pas mieux fondé qu’un argument précédent.
La locution la plus courante est faire droit suivi d’un complément d’objet indirect : faire droit à une demande, l’accueillir. Faire droit à une action, à une allégation, à un appel, à un argument, à une assertion, à des conclusions, à une contestation, à un contrôle, à une défense, à un examen, à une exigence, à une fin de non-recevoir, à un grief, à une injonction, à un intérêt en cause, à une mesure, à une motion, à un moyen, à une objection, à une opposition, à une ordonnance, à un plaidoyer, à une plainte, à un pourvoi, à une prétention, à un privilège, à une procédure, à une réclamation, à un recours, à un redressement, à une réparation, à une requête, à une revendication.
Dans la procédure civile française, on distingue les jugements avant dire droit (ce sont les jugements dits préparatoires) des jugements interlocutoires. Par exemple, s’agissant d’un procès mettant en cause la responsabilité civile d’une partie, le juge dira que, avant faire droit, c’est-à-dire avant de statuer définitivement, il déclare le défendeur seul responsable des conséquences de l’accident et ordonne une expertise médicale avant de fixer les dommages-intérêts et d’adjuger les dépens.
Liquider les droits. Ce syntagme signifie, en droit, dégager soit la part qui revient à chacun au moment de l’ouverture d’une succession, de la cessation d’une indivision, de la dissolution d’une société, du partage du régime matrimonial des époux, soit le montant de la pension du salarié qui prend sa retraite. Faire liquider ses droits à pension. « Les personnes âgées de 60 à 65 ans peuvent faire liquider leurs droits de retraite complémentaire à taux plein sans abattement, si la retraite de base est calculée à taux plein. » Dans la langue courante, liquider les droits signifie les supprimer. « Le gouvernement risque de liquider les droits des femmes en matière d’avortement. »
Pour valoir ce que de droit. Cette locution est une variante de la locution servir et valoir ce que de droit. Elle signifie en vue d’obtenir les effets juridiques ou ceux qui se trouvent inclus à l’état virtuel dans le fait ou l’acte dont on demande la constatation ou la consignation. Par exemple, le certificat médical sollicité par la femme battue est dressé pour valoir ce que de droit : le médecin ne fait que constater les sévices subis sans donner au certificat une fin juridique quelconque. Il appartient à la victime de l’utiliser à une fin quelconque, dans une action en divorce ou dans une poursuite judiciaire. Il incombe au tribunal de lui accorder la valeur juridique qu’il mérite. De même en est-il du rapport d’expertise ou de quelque document que ce soit.
Autre tournure elliptique : délivré pour valoir ce que de droit. « La présente attestation est délivrée pour servir et valoir ce que de droit. » Les formules d’attestation (de toute sorte) se terminent souvent par la locution Fait pour valoir ce que de droit.
Remplir de son droit. Cette locution signifie notamment satisfaire pleinement un ayant droit en lui attribuant exactement ce qui lui est dû. « Il est rare que dans une procédure de distribution par ordre ou par contribution, tous les créanciers soient intégralement remplis de leurs droits. »
Sans égard au fond du droit. Cette locution est propre à la phase de recevabilité dans un procès et se trouve aussi dans une procédure extrajudiciaire. Elle signifie à s’en tenir à la régularité formelle, en dehors de tout examen sur le bien-fondé de la demande. « Le conservateur des hypothèques refuse ou rejette la formalité de publication des titres lorsqu’il constate, sans égard au fond du droit, que les documents présentés ne sont pas conformes aux règles qu’il a mission de faire respecter. »
Sans préjudice des droits. Cette locution signifie sans que le droit dont l’intéressé est titulaire en souffre ou en soit atteint. « Le tout, sans préjudice du droit du cédant de conserver ses parts. » Elle a pour antonyme la locution au préjudice des droits.
Sous les charges et conditions ordinaires et de droit. Cette locution de la pratique notariale signifie selon les règles que la loi et l’usage prévoient pour chaque type de conventions d’après sa nature. Cette mention de style dans les actes notariés dispense l’acte d’énumérer toutes les obligations des parties. Les mots charges et conditions ne sont pas des synonymes, le mot charges étant assimilé aux obligations et aux responsabilités particulières des parties. « Le présent acte est passé sous les charges et conditions ordinaires et de droit. » Contrat passé sous les charges et conditions ordinaires et de droit.
La locution Sous toutes réserves que de droit appartient au langage judiciaire et signifie réserve étant faite de toutes les sanctions prévues par la loi. Il faut éviter l’anglicisme [sans préjudice] ("without prejudice") dans toutes les formules où réserve est faite de tous droits pouvant découler de l’assertion ou de l’offre faite. Variantes : sous réserve des droits, sous réserve de tout droit ou encore sous toutes réserves, mentions figurant au début d’une lettre ou d’un acte et généralement mises en majuscules.
Sur son affirmation de droit. Cette locution signifie sur simple déclaration sans que l’on soit tenu de la prouver. C’est, elle aussi, une clause de style. Elle s’emploie relativement à l’adjudication des frais de l’instance qui clôt l’énoncé des chefs de demande contenus dans les conclusions. « Condamne X(…) aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Y(…) sur son affirmation de droit. »
Tel que de droit. À telle personne que de droit. Il faut se garder de confondre ces deux locutions apparentées. La première s’emploie dans le langage judiciaire et signifie d’une façon jugée satisfaisante par le tribunal, tandis que la seconde se dit de toute personne que la loi considère comme la personne habilitée pour accomplir tel ou tel acte ou pour en être la bénéficiaire : elle est quasi-synonyme de la locution à qui de droit, qui n’est pas une locution technique du droit. On dit s’adresser à qui de droit, mais on ne peut pas [s’adresser] à telle personne que de droit.
Tirer toute conséquence de droit. Pour le juge, c’est apprécier librement l’attitude de la personne et lui donner telle suite que de raison. Par exemple, si le plaideur refuse de se prêter à un examen ou déclare telle ou telle chose, le juge sera amené à former sa conviction dans un sens en particulier.
Tous droits et moyens réservés. Cette locution se trouve placée en tête du dispositif de certaines dispositions dans le style judiciaire français. Elle permet au juge de déclarer qu’il ne statue pas au fond, mais provisoirement ou avant dire droit. Tous droits et moyens des parties étant réservés, le juge des référés ordonne la mise sous séquestre d’un objet, par exemple pour éviter qu’il disparaisse.
Le nouveau droit, tel le droit de l’Internet ou du cyberespace, ne fait qu’émerger dans la sphère ou dans l’univers du droit. Le nouveau Code civil du Québec est accompagné des commentaires du ministre de la Justice dans lesquels il signale toutes les modifications apportées aux articles du Code et l’adoption de dispositions qui constituent du droit nouveau (et non du [nouveau droit]). Ainsi en est-il du nouveau Code de procédure civile en France.
Dans cette acception, le nouveau droit s’entend de l’ensemble des règles qui régissent une nouvelle réalité juridique. « Dans le nouveau droit du cyberespace, il y a concurrence de régulations. Aucune autorité ne peut exercer un monopole sur l’énonciation des règles ainsi que sur leur application. » Nouveau droit du commerce électronique. Nouveau droit de l’aide personnalisée à l’autonomie.
Toutefois, rien n’interdit de qualifier de nouveau un domaine du droit qui est renouvelé en profondeur pour tenir compte des réalités nouvelles. Ainsi parle-t-on du nouveau droit québécois des associations personnifiées, du nouveau droit du divorce, du nouveau droit de la gestion sociale, du nouveau droit d’auteur, et ainsi de suite.
Il arrive que, dans la syntaxe française de l’adjectif, la place qu’il occupe par rapport au nom qualifié ne change aucunement le sens. On dit tout aussi bien droit flexible que flexible droit, droit pur que pur droit. L’adjectif antéposé met l’accent sur la qualification sans toucher au sens du terme. Question de pur droit, question de droit pur. Habituellement, il faut se garder d’employer le verbe créer quand le complément direct du verbe est qualifié de nouveau : dire, par exemple, créer un [nouveau] régime de droit est commettre un pléonasme vicieux puisqu’on ne peut créer que quelque chose de neuf ou de nouveau.
Toutefois, dans l’expression créer un nouveau droit, le pléonasme léger n’empêche pas l’expression d’être correcte, même s’il vaut mieux, en bonne rédaction, écrire établir, édicter, prévoir ou employer d’autres verbes adéquats.
Il convient de recourir au langage imagé et fleuri du droit seulement quand le contexte s’y prête. La balance de justice, le glaive, Thémis, le faisceau (de droits), le mince fil d’or qui illumine la trame du droit, les domaines, les frontières, les sphères du droit, les piliers du droit, l’écheveau, les sources, les racines, le tronc, les branches du droit constituent un bassin d’images récurrentes dans lequel il ne faut pas hésiter à puiser avec modération.
L’emploi de ces images dans les textes didactiques et dans l’enseignement présente plusieurs avantages : il éveille l’intérêt, pique la curiosité, ajoute vie et couleur, fait aimer le droit par la connaissance des origines et des développements de l’image particulière tout en facilitant la compréhension du concept et en constituant, fait appréciable, un procédé mnémotechnique fort efficace.
Si cette consécration vise une institution fondamentale, on dit alors que cette dernière constitue un pilier du droit. Dans l’ensemble, les auteurs estiment que le droit est soutenu par trois piliers : la famille, la propriété et le contrat.
La métaphore minérale de l’édifice du droit positif et de ses triples piliers sert souvent à énumérer les catégories fondamentales d’une branche de droit en particulier. Par exemple, les actes de commerce, les commerçants et le fonds de commerce constituent les trois piliers du droit commercial. En droit communautaire, trois piliers forment l’Union européenne : les traités fondamentaux, ensemble leurs modifications, la politique étrangère et de sécurité commune ainsi que la coopération en matière de justice et d’affaires intérieures.
Le droit du commerce électronique repose sur trois piliers : la personne, les contrats électroniques et les nouvelles propriétés. « Dans le domaine du droit pénal international, trois piliers principaux doivent concourir à l’établissement d’un système de justice pénale : un pouvoir judiciaire (des magistrats) indépendant; un ministère public qui préserve l’intérêt public; des avocats de la défense jouissant de l’indépendance nécessaire à remplir leur mandat de manière vigoureuse et efficace. »
L’image du pilier sert également à désigner le fondement d’un droit ou les divers éléments principaux d’un texte ou d’un système. « Le droit à réparation reposait sur deux piliers dont l’un ne cesse de se renforcer, l’autre de s’effriter. Le pilier, qui, demain, sera sans doute le seul soutien du droit est l’exigence, en fait, d’une union stable et durable (…) Le pilier qui s’écroule est le caractère non délictueux de l’union adultérine. »
Dans le droit de la personne et son lien de plus en plus étroit avec le droit de l’environnement, un auteur estime que le développement durable repose sur les trois piliers que constituent le système socioculturel, le système économique et le système écologique.
Un autre affirme qu’une stratégie en droit familial axée sur les besoins des enfants à la suite d’une séparation ou d’un divorce doit prendre appui sur trois piliers : les services de justice familiale, la réforme législative et l’expansion des tribunaux unifiés de la famille.
Enfin, un projet de loi présenté récemment en droit criminel compte, dit son parrain, trois piliers : la création d’un statut de repenti, l’instauration du « plaider-coupable » et l’infiltration des bandes organisées.
L’emploi didactique répandu de la métaphore du pilier illustre un procédé d’expression que privilégient les juristes pour organiser la pensée autour d’une idée directrice tout en soulignant, par l’éclairage que produit la notion de pilier, l’importance de l’objet du propos. Tel article, dira-t-on, est l’un des trois principaux piliers du temple de la justice, un des piliers de la loi. Tel texte est l’un des piliers législatifs d’un système en particulier, le système judiciaire national unifié, l’un des piliers de la Constitution canadienne. Le rapport fiducial est établi sur les deux piliers du titre aborigène, tel motif est l’un des piliers d’une décision judiciaire, le principe du contradictoire, l’un des piliers de tout un système juridique, l’indépendance judiciaire constitue l’un des piliers de la démocratie constitutionnelle, le droit de présenter une défense pleine et entière ou la règle de la divulgation sont des piliers de la justice criminelle. « Le droit d’accès aux tribunaux constitue sous le régime de la primauté du droit un des piliers de base qui protège les droits et libertés des citoyens. »
D’où la métaphore filée des branches du droit et des branches des droits, puis, allant ainsi du plus grand (l’arbre, le tronc et les multiples branches, de la branche originale aux branches maîtresses et secondaires) au plus petit, on évoque les racines, les rameaux du droit, de ses matières, lesquelles sont conçues comme des ramifications qui contribuent à structurer, à organiser le droit pour en faire, en somme, un système vivant. « Le droit civil constitue dans l’ensemble des branches du droit une branche originale. » Ramification du droit. « Le droit se ramifie en branches maîtresses, ce sont les divisions du droit, et en branches secondaires, ce sont les sous-divisions du droit. » « L’ordre juridique n’est pas d’une seule pièce. Le droit objectif se divise en branches, dont chacune se subdivise en rameaux. » « La règle de droit a ses racines dans le pouvoir de l’État de régir de nombreux aspects de la vie des sujets de droit. »
Les auteurs de monographies sur une catégorie du droit ou d’ouvrages d’introduction au droit étudient leur sujet dans toutes ses branches et ses ramifications. « Ce droit très ramifié sera étudié dans toutes ses branches. » On parle aussi de la germination du droit dans l’évocation des sources du droit.
Il y a omission de l’article ou du possessif devant tout substantif accompagnant le mot droit, s’il n’y a pas de déterminant. « Ce service a pour mission de sensibiliser le public à ses droits et obligations. » « Sauf indication contraire, nul texte ne lie Sa Majesté ni n’a d’effet sur ses droits et prérogatives. »
L’article ou le possessif apparaît s’il y a présence d’un déterminant. « Le présent article ne porte pas atteinte aux droits et aux recours que prévoit la Loi sur le droit d’auteur. »
Le langage du droit privilégie non seulement l’usage des doublets (droits et actions; droits et charges; droits et conditions; droits et limitations; droits et privilèges; droit ou autorisation; droit ou avantage; droit ou bénéfice; droits ou hypothèques; droits ou immunités; droits ou intérêts; droit ou mandat; droits ou restrictions; droit ou servitude; droit ou titre; domaine ou droit), mais aussi celui des triplets (droits, biens et créances; droits, pouvoirs et privilèges; droits, privilèges et obligations) et, même, des quadruplets, surtout en common law, du fait du souci de précision et de complétude qui caractérise ce régime de droit aux fins de sécurité juridique (droits, pouvoirs, immunités et privilèges; droits, privilèges, restrictions et conditions; droits, privilèges, restrictions et obligations).
La même règle grammaticale s’applique aux différentes séries synonymiques.
En se subdivisant, ces actes deviennent des faisceaux (théorie des faisceaux des droits). Le mouvement de l’imagination juridique allant de nouveau du plus grand au plus petit, ces faisceaux sont constitués par des liens, des attaches, des attributs grâce auxquels est assurée la cohérence du droit. « Le droit parental est à trois dimensions : c’est un droit des relations entre parents et enfants, un droit des relations entre parents, un droit des relations entre enfants des mêmes parents. Chacun des liens qui forment ce faisceau obéit à des principes propres et complémentaires. » « Le gouvernement de la personne du mineur regroupe les attributs proprement dits de l’autorité parentale. Ces attributs forment un faisceau (…) » « Ce type de revendication territoriale générale n’est pas qu’un simple faisceau de droits ancestraux distincts autorisant l’exercice d’activités particulières. » Faisceau de droits formant le droit de propriété.
À ces faisceaux sont attachés des effets de droit nés du nœud ou du noyau des règles fondamentales qui gouvernent un état de droit ou une situation juridique.
Dans une autre perspective, plus ancienne celle-là, les juristes imaginent le droit comme un immense corps de règles constituant l’autonomie du droit : corps de droit, corps cohérent de règles de droit ("corpus juris"), pour en faire un système, avec ses organes (de conception, d’application, d’exécution). Ainsi définit-on le droit du point de vue de sa constitution comme un corps de règles gouvernant sujets et situations.
Dans l’éclairage des métaphores foncières et des images matérielles, le droit est vu comme un vaste domaine, un champ, un terrain, ponctué de marques, de bornes, de jalons, de balises, de frontières, de limites. Sous l’angle de ses fondements, l’image privilégiée est naturellement celle de ses assises : les assises du droit privé demeurent ses grands principes fondamentaux. « L’une des assises du droit de l’arbitrage 1 est le consentement des parties à l’arbitrage. »
Le pouvoir de dire le droit est celui, pour le juge, de statuer. Il possède celui qu’autorise la mise à exécution de la décision de justice, soit commander. Cette dualité est représentée notamment dans les images-symboles de la balance de justice (deux plateaux : se prononcer sur le pour et le contre, balancer les droits et les intérêts des parties), d’un côté, et, de l’autre, de l’épée ou du glaive et du bouclier (exécution et préservation, protection des droits).
Ainsi, un droit-fonction naît lorsque le droit dont s’agit est attribué dans la perspective d’un pouvoir et d’une compétence, lesquels sont mis au service d’une fonction particulière. Au pluriel, on écrit des droits-fonction lorsque plusieurs droits ont le caractère d’une fonction. Dans le droit de la famille, la loi confie aux père et mère ou au tuteur, le cas échéant, des droits-fonction à l’égard de l’enfant, droits de garde, de surveillance et d’éducation qui ne visent aucunement leur intérêt en soi, mais qui mettent en valeur le bénéfice retiré par l’enfant de la fonction qu’ils sont tenus d’exercer à son endroit.
De même, dans le droit de l’administration publique, le terme droits-fonction renvoie aux pouvoirs et aux compétences attribués aux fonctionnaires ou aux agents publics à l’égard de l’administré, non dans leur intérêt personnel, mais pour le bien du service qu’ils ont à lui rendre.
Le droit n’a pas toujours un caractère fonctionnel; sa nature peut relever de facultés ou de créances. Dans les droits de la personne, on considère les droits civils et politiques dans la sphère de sa liberté et de son initiative. Le droit à la justice, à la vie, le droit de vote, de liberté de pensée et de religion et l’interdiction de la torture notamment entrent dans une catégorie qualifiée de droits-facultés ou de droits-autonomie.
Si on considère les droits économiques, sociaux et culturels dans la perspective du bien-être et de l’épanouissement de la personne, on évoquera le droit au travail, à la sécurité sociale, à un niveau de vie suffisant, à la protection de sa santé, à l’éducation et à la culture comme constituant des droits-créances ou des droits-participation.
Il importe de distinguer deux notions fondamentales dans la théorie du droit : la règle de droit et le principe de droit. Ainsi, des cas surviennent où les tribunaux estiment qu’une règle de droit considérée comme un précédent doit être écartée pour céder la place à un principe de droit. Le principe a une portée plus large et peut être invoqué avec succès lorsqu’on se trouve en présence de règles contradictoires ou restrictives. Il permet d’élever le débat au-dessus des règles incompatibles, de les reformuler ou d’en établir ou édicter de nouvelles.
Dans l’arrêt Pettkus c. Becker, la Cour suprême du Canada a écarté la règle de la fiducie par déduction (appelée aujourd’hui fiducie résultoire) selon laquelle la partie lésée, pour obtenir gain de cause, doit démontrer qu’elle a fourni une contribution pécuniaire à l’acquisition du bien. Sans abolir la règle, elle l’a écartée pour y substituer le principe de l’enrichissement sans cause, dont la portée est plus large que la règle et qui n’oblige pas à prouver l’apport de la contribution pécuniaire. Ainsi est-on fondé à affirmer que le principe de droit a préséance sur la règle de droit dans les cas qui le commandent.
En outre, la règle de droit et la primauté du droit sont deux notions apparentées et associées, mais elles ne sont pas synonymes. L’indépendance judiciaire, par exemple, est un préalable à la règle de droit et à la primauté du droit. Aussi, le principe de l’autonomie du pouvoir judiciaire assure tous les citoyens que l’administration de la justice se fait de façon indépendante, sans qu’il soit tenu compte du pouvoir ou de la situation personnelle de l’une des parties au litige (le corollaire du principe de la primauté du droit), et que tous, indépendamment de leur statut social ou de leurs ressources financières, sont soumis à la même règle de droit (le principe de l’équité de cette règle) sans craindre l’ingérence de tierces parties étrangères au litige. La primauté du droit est un régime juridique qui soumet tous les sujets de droit à l’empire de la loi commune.
Cette distinction capitale conduit nécessairement à une autre : celle qui oppose le droit, le quasi-non-droit et le non-droit.
On écrit quasi-non-droit et non-droit, avec le trait d’union, même si on trouve un usage parallèle abondant avec omission du trait d’union. Pourtant, la règle grammaticale est claire et ne souffre aucun tempérament lorsque les termes forment une unité de sens et que les adverbes quasi et non sont apposés à un substantif; le trait d’union serait omis, si les deux adverbes étaient apposés à des adjectifs.
Les juristes qualifient de non-droit tout ce qui dans la vie civile n’appartient pas au droit, tout ce qui empêche l’infiltration du droit dans l’édifice juridique.
Le non-droit peut être appréhendé dans une double perspective : positive ou négative.
Toutes les actions humaines qui ne sont pas judiciarisées, notamment en droit criminel, relèvent du non-droit, toutes les situations non prévues par la loi sont des situations de non-droit (à ne pas confondre avec les situations illégales), tous les endroits dont l’accès est déclaré inviolable, que le droit considère comme des lieux réservés à la vie privée des citoyens, sont des lieux de non-droit, tous les territoires sur lesquels le droit ne peut s’ingérer ou intervenir sont des zones de non-droit, tous les mois de l’année ou toutes les heures de la nuit où la loi interdit que soient accomplis des actes de droit, telles les significations par huissier, les délivrances de mandats, les opérations de perquisition et de saisie, les expulsions de locataires défaillants sont des temps de non-droit. C’est là le non-droit envisagé dans une perspective positive.
Des réalités nouvelles cessent de constituer des espaces de non-droit lorsqu’une législation, une réglementation et une jurisprudence assurent un ordre juridique dans le cadre de règles de droit en vigueur, tel le cas du nouveau droit du cyberespace.
Mais le non-droit évoque sous un autre angle une sombre réalité. La jurisprudence de la Cour internationale de Justice et les rapports présentés à divers comités de l’Organisation des Nations Unies signalent de nombreux exemples de non-droit dans le monde.
Il existe des zones de non-droit dans lesquelles les êtres humains sont des esclaves au service de pilleurs des ressources naturelles du pays, des trafiquants d’armes et d’espèces animales en voie de disparition et des bandits de tout acabit. On trouve des capitales du non-droit, des zones de non-droit, qui sont interdites d’accès même aux forces de l’ordre, des terres, des îles de non-droit ravagées par des révolutions, des guerres de gangs, des soulèvements populaires qui suspendent la vie du droit, des pays où ne peuvent plus s’appliquer des textes légaux et des conventions internationales. Des États de non-droit sont soumis à la dictature ou sont le théâtre de violences impunies, des groupes de terreur y font la loi, il y a là absence d’état de droit. Des zones-frontières dans lesquelles des étrangers dont le statut est indéfini vivent sans droit effectif dans des situations qui ne sont régies par aucun texte, cette absence de réglementation leur étant préjudiciable.
L’État de non-droit se caractérise souvent par la faiblesse et le dysfonctionnement de ses appareils gouvernemental et judiciaire. Pour rétablir l’état de droit dans un État de non-droit, l’existence et l’application de procédures légales établies et le fonctionnement d’un système judiciaire indépendant capable de réagir à des rapports de violations des droits de la personne sont essentiels.
Il arrive que des États créent des droits et des obligations particuliers qui n’ont aucun lien avec le droit général. La zone normative qui les entoure paraît demeurer une zone de non-droit tant qu’un lien juridique et légal n’existera pas entre le droit général et des règles particulières.
Lorsque l’État semble incapable d’étendre son autorité dans certains domaines du droit, tels le droit de la personne, le droit du travail ou, même, le droit des affaires, des zones de non-droit prospèrent et sont propices aux actions de groupes criminels ou terroristes. Il y a existence du non-droit lorsque se manifeste le mépris flagrant des garanties internationales concernant des droits fondamentaux (droit à la vie, droit à l’accès à la justice, droit à la sécurité humaine), le non-droit devenant une rupture de l’ordre juridique par la commission d’actes illicites.
Plus généralement, une situation de non-droit existe lorsqu’il y a absence d’une structure traditionnelle administrative qui permet un déploiement de l’administration de la justice civile et pénale dans des circonstances normales. Cette situation conduit rapidement à un état de non-droit qui se perpétue jusqu’à ce que l’ensemble des individus, des institutions et des entités publiques et privées, y compris l’État lui-même, acceptent de répondre de l’observation des lois promulguées publiquement, appliquées équitablement et également pour tous. L’état de non-droit fait place à l’état de droit lorsque sont adoptées et observées généralement « des mesures propres à assurer le respect des principes de la primauté du droit, de l’égalité devant la loi, de la responsabilité au regard de la loi, de l’équité dans l’application de la loi, de la séparation des pouvoirs, de la participation à la prise de décision, de la sécurité juridique, du refus de l’arbitraire et de la transparence des procédures et des processus législatifs() »
Il y a quasi-non-droit lorsqu’une situation qui perdure est alimentée par l’impunité, l’injustice, l’inégalité et l’absence presque totale de règles de droit établies dans des domaines ou des matières de l’activité générale d’un État. Le droit se fragmente et des fissures lézardent l’édifice du droit par immixtion du non-droit.
Les migrants qui sont impunément victimes d’abus, de violences et d’actes de discrimination dans les pays d’accueil vivent dans des conditions de quasi-non-droit.
Le quasi-non-droit est assimilé au droit mou : se reporter ci-dessus au point 14). Les situations de guerre, les abus de droit, les systèmes judiciaires non crédibles, la formation de zones urbaines de non-droit où les dégradations, la pauvreté, la misère et le dénuement tendent à devenir des milieux de vie permanents, la constitution de paradis fiscaux, judiciaires et bancaires, repaires de la criminalité organisée, de la corruption, du trafic d’influence, de la fraude et de l’évasion fiscales ainsi que d’opérations délictueuses contribuent, chacune à sa manière, à propager une atmosphère de non-droit, à multiplier le nombre des victimes de non-droit en entretenant l’impunité, en favorisant la corruption et en rendant inopérants les textes légaux.
La locution avoir le droit de est suivie d’un infinitif. On a le droit de faire quelque chose. On ne dit pas : [J’ai droit] de le faire, mais bien J’ai le droit de le faire. Les locutions être en droit de et avoir le droit de sont synonymes.
On a un droit ou des droits sur une chose parce qu’il est sous-entendu qu’un droit s’exerce sur une chose. Acquérir un droit sur un fonds, sur une clientèle. « Les droits des créanciers inscrits s’exercent, avec leur rang antérieur, sur le fonds transformé. » « Les peines pécuniaires, amputant le patrimoine, frappent tous ceux qui vivaient de ce patrimoine ou qui avaient des droits sur lui. » (= ou qui avaient des droits qu’ils exerçaient sur lui).
Cependant, puisqu’on ne peut exercer des droits [sur] une succession, on dit correctement que l’on a des droits dans une succession.
Dans son acception monétaire ou pécuniaire, le mot droit s’entend d’un impôt, d’une taxe, d’une redevance, d’une charge, bref de tous frais à débourser ou de toute somme à percevoir ou à collecter. Le mot droit représentant une somme d’argent est le plus souvent employé au pluriel.
Cette distinction doit être observée dans tous les cas de concurrence entre ces deux mots. Droit d’admission et frais d’admission; droit d’agrément et frais d’agrément; droit d’adhésion et frais d’adhésion; droit d’avis et frais d’avis; droit d’immatriculation et frais d’immatriculation; droit d’inscription et frais d’inscription.
On perçoit des droits et on paie des frais. Ainsi, en droit maritime, s’il faut parler de la rémunération à verser aux personnes grâce auxquelles a lieu une opération de sauvetage en mer d’un navire ou de sa cargaison, on dira frais et non [droits] de sauvetage, et frais (et non [droits]) de manutention, s’il s’agit de la rémunération à verser aux personnes affectées au chargement ou au déchargement d’un navire marchand dans un port.
Seul le contexte permet parfois de déterminer si le mot droit formant un syntagme doit s’entendre dans le sens soit de faculté ou de prérogative, soit dans son acception monétaire. La liste ci-dessous fait apparaître les syntagmes qui peuvent créer de la confusion à défaut de contexte.
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