Juridictionnaire
capable / incapable / susceptible
Le mot capable est un adjectif, tandis qu’incapable est un substantif et un adjectif. L’adjectif est suivi de la préposition de, elle-même suivie d’un infinitif ou d’un substantif. Être capable de contracter, d’ester 1 et 2 en justice, de disposer, de recevoir par testament, de voter. « Toute personne, physique ou morale, est capable d’agir en justice. » « Les personnes capables de compromettre peuvent renoncer à l’appel. » « Le mineur émancipé est capable, comme un majeur, de tous les actes de la vie civile. » « Le fonctionnaire reconnu coupable sera déclaré à jamais incapable d’exercer une fonction publique. » Être incapable d’agir. Substantif : Émancipation d’un incapable. « Les incapables ne peuvent engager leur responsabilité légale. » Les incapables et les absents. Incapables majeurs. Le représentant d’un incapable. Curateur à l’incapable.
- Dans le langage juridique, est capable la personne qui remplit les conditions légales pour pouvoir exercer certains droits; l’incapable est la personne qui n’a pas la capacité légale exigée pour la jouissance ou l’exercice de certains droits. « La personne capable de contracter qui accepte le dépôt 1 et 2 fait par une personne incapable est tenue de toutes les obligations d’un véritable dépositaire. » « Les interdits et les mineurs sont les principaux incapables définis par la loi. » « La péremption opère contre les incapables. » Partie (devenue) incapable.
- La locution susceptible de ne peut être employée pour exprimer la capacité légale. Ainsi, au lieu de dire « Il est majeur et est donc [susceptible] de contracter », il faut dire « Il est majeur et est donc capable de contracter. »
- On ne s’entend pas sur la distinction à faire entre les adjectifs susceptible et capable. La plupart des ouvrages consultés soulignent que l’adjectif susceptible marque une disposition occasionnelle ou temporaire, une capacité latente : « Cette stagiaire est susceptible d’aider, le cas échéant, le juge dans la rédaction de ses jugements. » (les fonctions principales de la stagiaire en question étant d’un autre ordre). En revanche, capable exprime une possibilité, une aptitude permanente : « Cet avocat est capable de diriger un gros cabinet. » Une autre distinction réside dans le fait que susceptible, contrairement à capable, signifie être exposé à qqch. Ainsi, à propos d’une décision de justice contre laquelle un recours est ouvert, on dit être susceptible de recours (et non [être capable]). Être susceptible d’appel, d’opposition. L’antonyme est insusceptible.
- Par ailleurs, plusieurs auteurs affirment que l’adjectif capable exprime une possibilité active fondée sur le pouvoir de faire quelque chose. « Il est capable de trancher les causes fiscales les plus complexes. » Susceptible exprimerait quant à lui une possibilité passive, la possibilité de subir une action. « Cet avocat est susceptible de se décourager, si on lui confie un dossier trop complexe. » En d’autres termes, on ne pourrait être susceptible que de recevoir, de subir, d’éprouver, alors qu’on serait capable de donner ou de faire. S’appuyant sur plusieurs bons auteurs, certains grammairiens affirment que susceptible peut s’employer au sens actif de propre à ou de nature à faire quelque chose. « Cette avocate est susceptible d’ébranler avec pareils arguments les convictions du tribunal. »
Enfin, capable s’emploie au sens mélioratif ou positif; lorsque le sens est péjoratif ou négatif, on emploie plutôt susceptible : « Il est [capable] des pires actes » (= est susceptible, peut commettre).
- Comme dans le cas du substantif incapacité auquel il correspond, le premier sens de l’adjectif incapable qui a été attesté (1464) est le sens juridique du mot, c’est-à-dire celui de personne frappée d’une incapacité à jouir d’un droit ou à l’exercer. « Dans bon nombre de pays, la femme mariée était, jusqu’à une époque assez récente, considérée comme incapable. »
- On ne peut donner à l’adjectif incapable un sens qui s’applique à une situation plutôt qu’à une disposition physique, mentale ou morale. Dans le cas d’une situation, on parle d’impossibilité et non d’incapacité. Ainsi, on n’est pas [incapable] de se présenter à la salle d’audience, mais on est dans l’impossibilité de s’y rendre. « Il est [incapable] de mettre la cause au rôle. » (= « Il lui a été impossible de mettre la cause au rôle. »)
© Centre de traduction et de terminologie juridiques (CTTJ), Faculté de droit, Université de Moncton