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Suivant cette conception, est jugé admissible ou inadmissible tout élément de preuve ou toute procédure conforme aux règles de procédure. Une demande, une requête, un appel, un pourvoi est qualifié de recevable ou d’irrecevable si sont respectées les conditions de recevabilité.
Par conséquent, peut-on demander, y a-t-il lieu d’éviter de parler de la [recevabilité] d’une procédure ou encore de l’[admissibilité] d’une demande en justice ou d’une action? La formule consacrée le demandeur est (jugé) recevable en sa demande signifie que le tribunal accepte de juger sa demande, de la recevoir (et non qu’il est [admissible] en sa demande et que le tribunal accepte de ce seul fait de l’[admettre]). Demandeur déclaré, jugé, dit irrecevable en sa demande.
Pourtant, l’admissibilité (on trouve aussi non-admissibilité) et la recevabilité se disent toutes deux d’une preuve. Si, pour être jugée admissible, la preuve doit être conforme aux règles d’admissibilité que prévoient les règles de procédure, pour être jugée recevable, elle doit posséder trois attributs : elle doit être pertinente (elle a pour objet le point en discussion), substantielle (elle est d’une importance indiscutable, elle comporte une conséquence significative et fournit un fondement factuel déterminant sur lequel les questions soulevées peuvent être raisonnablement réglées) et admissible (elle peut être reçue et appréciée à bon droit par tout tribunal compétent).
Par ailleurs, l’affaire, la cause, le litige est recevable si elle est ou s’il est en état d’être jugé au fond. Aussi, on peut dire que les décisions portant sur l’admissibilité sont des décisions interlocutoires, étant rendues en cours d’instance, avant le jugement définitif tranchant l’affaire, alors que les décisions portant sur la recevabilité sont préjudicielles puisqu’elles sont rendues avant l’introduction de l’action.
Quand le juge déclare une procédure ou un élément de preuve admissible ou inadmissible, l’instance se poursuit, elle a déjà été entamée, la procédure a été mise en branle. L’admissibilité ou l’inadmissibilité ne mettent pas un frein à l’action, tandis que la recevabilité ou l’irrecevabilité pourront permettre que l’action soit jugée ou conduire le juge à constater qu’il n’est pas saisi.
Par conséquent, tout ce qui sera jugé admissible, tout ce qui possède la qualité nécessaire pour être examiné judiciairement sera déclaré recevable, la recevabilité étant subordonnée étroitement à l’admissibilité.
De même, telle ou telle demande, requête, action sera jugée recevable ou irrecevable selon que le demandeur ou le défendeur a la qualité nécessaire ou qu’il est sans qualité pour la former, ou qu’il a ou non capacité requise pour l’intenter, s’il justifie ou ne justifie pas d’un intérêt pour l’introduire ou si l’instance ne respecte pas les formes légales. « L’action civile sera recevable pour tous les chefs de dommages aussi bien matériels que corporels ou moraux qui découlent des faits objets de la poursuite. » La procédure qui n’a pas été introduite dans les délais impartis par la Loi sur la prescription sera déclarée irrecevable. Un appel est recevable quand il est interjeté dans les délais d’appel prescrits.
Dans d’autres cas, la recevabilité ou l’irrecevabilité pourront être subordonnées à la compétence ou à l’incompétence du tribunal. Par exemple, une demande est irrecevable quand son chiffre est supérieur au taux de compétence. Elle ne sera pas reçue à la Cour des petites créances quand la somme réclamée est supérieure à tant de dollars ou que, s’agissant d’un appel, l’exception d’incompétence soulevée n’a pas été opposée directement devant le premier juge.
Par ailleurs, on appelle témoin d’admissibilité ("foundation witness") le témoin qui, ayant examiné un écrit de lui qui lui est présenté, ne parvient pas à se rappeler les événements qu’il a lui-même relatés dans cet écrit. Même si ce témoin ne pourra pas témoigner au sujet de ces événements, l’écrit lui-même pourra être déclaré admissible comme faisant foi de son contenu, s’il peut établir la véracité de l’écrit en fonction des quatre critères de la transcription des souvenirs : il a eu une connaissance de première main de ces événements, l’écrit constitue une déclaration originale qu’il a faite à l’époque de la survenance des événements, il n’a pas de mémoire actuelle des événements et il doit garantir l’exactitude de l’écrit.
En matière de découverte d’un trésor, par exemple, on dira que la revendication est recevable (et non [admissible]) puisqu’elle constitue une action (l’action en revendication mobilière); toutefois, on pourra dire que la preuve de la propriété de l’objet perdu est admissible (plutôt que [recevable]) parce que le demandeur à l’action s’est conformé à la règle de preuve qui exige du revendiquant qu’il justifie par tous moyens de sa propriété sur le trésor.
Une demande recevable pourra, au terme du procès, être déclarée mal fondée, tout comme une preuve, jugée admissible, pourra par la suite être déclarée défaillante pour quelque motif que ce soit.
© Centre de traduction et de terminologie juridiques (CTTJ), Faculté de droit, Université de Moncton